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Pour le droit des mères voilées à accompagner les sorties scolaires

La ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud Belkacem, vient d’autoriser les mères portant le voile à accompagner les sorties scolaires. La plupart des organisations laïques sont vent debout contre cette décision. Il y a quelques semaines, c’était plutôt le camp des intégristes qui montait au créneau pour reprocher à la ministre de vouloir défendre l’égalité hommes femmes à l’école. Décidément, la recherche d’un équilibe entre égalité et laïcité n’est pas simple à trouver dans notre pays, rongé par les postures passionnelles dès qu’ils s’agit de ces sujets.

La statut des accompagnateurs

Au coeur de la polémique, le débat porte sur le statut de ces accompagnateurs scolaires. Faut-il les considérer comme de simples parents bénévoles ou du personnel associé à l’éducation nationale et donc soumis aux exigences de neutralité religieuse ?

Le débat est moins juridique que politique. A peu près toutes les instances de ce pays ont donné un avis juridique différent sur ce statut des accompagnateurs scolaires, selon qu’elles soient pour ou contre cette interdiction.

La Haute Autorité de lutte contre les discrimination — plutôt tournée vers l’égalité — a considéré ce refus comme « contraire aux dispositions interdisant les discriminations fondées sur la religion ». A l’inverse, le Haut Conseil à l’intégration — plutôt porté sur l’exigence de laïcité — soutient ce refus.

Deux ministres de droite ont tranché dans des directions différentes. Xavier Darcos a laissé les chefs d’établissements décider au cas par cas. Son successeur, Luc Chatel, a édicté une circulaire permettant d’interdire, par principe, la participation de mères voilées. Vincent Peillon ne l’a pas remise en cause, sans insister sur la question des sorties scolaires dans sa Charte de la laïcité.

Najat Vallaud Belkacem a tranché… En se rangeant à l’avis du Conseil d’Etat. Ce dernier estime que les parents accompagnateurs ne sont pas des « collaborateurs du service public » et qu’ils échappent donc à l’obligation de neutralité religieuse. Ce qui ne veut pas dire que tout est permis, loin de là. La ministre, comme le Conseil d’Etat, insistent sur la possibilité d’appliquer certaines exigences de service public, comme le refus de prosélytisme religieux. Si l’on ne doit pas refuser une mère a priori, parce qu’elle porte le voile, on peut le faire si elle cherche à faire de l’entrisme ou de la propagande auprès des élèves. La balle est donc dans le camp des directeurs d’établissements. C’est à eux d’évaluer la situation et l’intention. Certaines organisations laïques y voient une démission du politique et une trahison de la laïcité. Ce n’est pas du tout mon avis.

Un juste équilibre

Comme j’ai eu l’occasion de l’écrire à plusieurs reprises, quitte à froisser certains laïques, je ne pense pas qu’il faille réglementer la tenue des parents d’élèves comme celle des élèves. Autant, la loi de mars 2004 était tout à fait nécessaire pour sortir du cas par cas et sanctuariser l’intérieur de l’école, autant il faut savoir faire preuve de souplesses quand il s’agit des parents et des sorties scolaires. Pour une raison simple, qui tient à une certaine idée de la laïcité mais aussi de l’école publique.

Elle n’est pas là pour enseigner un modèle absolu mais le droit au doute. Elle doit faire comprendre à chaque élève qu’il est certes l’enfant de ses parents mais aussi un futur citoyen. Ce qui suppose de lui permettre de se construire dans la neutralité religieuse le temps de mûrir ses choix… Si la République laïque doit encourager l’émancipation et le respect de l’égalité chez chaque citoyen en devenir, elle doit aussi (parce qu’elle est démocratique) respecter ces choix — même rétrogrades — une fois ce citoyen devenu adulte. Y compris le port du voile tant qu’il ne dissimule pas le visage et ne porte pas atteinte à la sécurité publique.

C’est la force et la subtilité de notre modèle, fait de droits et de devoirs, d’équilibre entre l’espace de la contrainte (l’école) et l’espace de la liberté (les sorties scolaires), entre laïcité et liberté religieuse.

De la générosité et de la pédagogie

Comment expliquer la générosité et la finesse de cette philosophie à un élève si on interdit à sa mère ou à celle de ses camarades d’accompagner les sorties scolaires comme les autres, alors qu’il s’agit de femmes adultes ?

Ces sorties scolaires sont une fenêtre vers l’extérieur. Les élèves ont bien conscience que les accompagnateurs sont les parents de leurs camarades et pas des professeurs. Il n’est pas possible de régir leur mode de vie comme s’il s’agissait d’enfants, d’élèves ou de personnels représentant l’institution.

Et d’ailleurs, s’il fallait étendre la contrainte aux parents, pourquoi n’interdire que le voile ? Il faut surtout écarter tout parent déséquilibré, alcoolique, intégriste ou raciste. Mais c’est justement ce que permet déjà la loi : trier en fonction des comportements. Ajouter une clause qui vise uniquement et spécifiquement la tenue de certaines mères n’aura qu’un effet désastreux et contre-performant. Celui de faire haïr la laïcité.

Il est déjà difficile d’expliquer à certains élèves que la loi de mars 2004 n’est pas discriminatoire mais émancipatrice. Si l’école devait écarter à priori leurs mères ou celles de leurs camarades, cette pédagogie devient extrêmement difficile pour les enseignants. De fait, nous aurions franchi cette frontière — très fine mais fondamentale — qui sépare la laïcité exigente de la laïcité autoritaire.

Il y a de bien meilleurs combats laïques à mener. Comme résister à l’inflation d’écoles confessionelles intégristes, parfois sous contrat. Pour le coup, cela demande un vrai courage politique.

Caroline Fourest

La chronique sur France Culture

Prix 2014 du Comité laïcité république

La cérémonie de remise des prix a eu lieu devant une nombreuse assistance de près de 600 personnes, accueillie par Mme Anne Hidalgo, maire de Paris, dans les salons de l’Hôtel de Ville.

Voici le palmarès : Le « Grand Prix international » a été attribué à Mme Shoukria Haïdar, présidente de l’association NEGAR de soutien aux femmes afghanes pour sa très courageuse action en faveur de l’égalité entre hommes et femmes et de l’éducation pour tous. Le « Grand Prix national » a été décerné à M. Jean-Luc Petithuguenin, président de Paprec Group, entreprise de 4500 personnes qui a mis en place une charte de la laïcité dans l’entreprise adoptée à l’unanimité des salariés.

Le jury a par ailleurs attribué deux prix spéciaux à deux philosophes « pour la force de leur œuvre en faveur de la laïcité ». – Catherine Kintzler, professeur honoraire à l’université Charles de Gaulle Lille III, vice-présidente de la Société française de philosophie (dernier ouvrage paru : Penser la laïcité, Ed. Minerve 2014) – Henri Pena-Ruiz, philosophe, écrivain, maître de conférences à Sciences-Po Paris (dernier ouvrage paru : Dictionnaire amoureux de la Laïcité, ed Plon 2014)

On peut voir photos et vidéos sur le site du Comité laïcité république, qui publiera également les diverses allocutions.

Le Poker serait halal selon un député islamiste marocain

Le député islamiste marocain Mohamed Yatim vient de déclarer que le poker était halal. Les jeux de hasard sont en principe interdits en islam. Mais il faut dire que le fils du député Salaheddine Yatim vient d’empocher 500 000 dirhams au Word Poker Tour National (WPTN) de Marrakech. Le député islamiste a donc du expliquer que le poker était plus un jeu, qu’un jeu de hasard.

Pour en savoir plus.

Tunisie : défaite historique des islamistes (Caroline Fourest)

Les islamistes ont reconnu leur défaite. Si elle se confirme, elle est historique et vient démentir ceux qui, parmi les journalistes ou les diplomates, n’ont cessé de répéter que les intégristes représentaient la Tunisie véritable. Ceux-là n’ont pas voulu voir la colère, profonde et populaire, contre Ennahdha et ses alliés.

Une photographie plus juste qu’après la Révolution

Le résultat annoncé n’est pas un revirement, mais le retour à une photographie réelle de la Tunisie. Le score des intégristes au lendemain de la Révolution s’expliquait essentiellement par le fait qu’ils étaient à la fois les martyrs les plus connus du régime de Ben Ali et les mieux organisés pour tirer profit de son départ. Les forces laïques s’étaient présentées en ordre très dispersé. Près d’une centaine de listes, parfois inconnues du grand public. Trois ans plus tard, la Tunisie a mûri. Les listes sont toujours nombreuses mais les Tunisiens ont souhaité voter utile pour placer Nidaa Tounes en tête et tirer les leçons de cet éparpillement. Tout valait mieux que le retour au pouvoir des intégristes, leur louvoiement face au terrorisme et leurs tentatives pour inscrire la charia dans la Constitution.

Même si elle a fini par être votée et qu’elle contient à peu près tout et son contraire -la liberté de conscience et le refus de porter atteinte au sacré-, cette Constitution a été adoptée dans un climat très lourd.

Les Ligues dites de protection de la Révolution, longtemps encouragées par la troïka au pouvoir, ont fait régner une terreur toute salafiste… Qui a culminé avec le meurtre de deux figures de la gauche tunisienne anti-islamiste, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Leurs morts, aggravées par la menace terroriste grandissante, ont provoqué un électrochoc dans un pays plongé dans une crise à la fois morale, économique et politique. Une crise qui a contraint les islamistes à quitter le gouvernement jusqu’aux élections, qu’ils espéraient gagner.

L’évolution tactique d’Ennahdha

Le fait que ce parti islamiste ait accepté de quitter le pouvoir pour laisser un gouvernement provisoire organiser les élections législatives n’est pas, contrairement à ce que l’on entend partout, la preuve qu’il ait renoncé à tout objectif d’islamiser la société, de la base jusqu’au sommet. Conformément à la doctrine des Frères musulmans, il s’agit d’un repli stratégique. Ne pas être au pouvoir quand cette échéance législative arriverait était le seul moyen de limiter la casse.

Et encore… Il aura fallu leur tordre le bras, la peur du scénario égyptien et d’assumer la mise en faillite du pays, pour qu’ils rendent les clefs d’un gouvernement qui est allé bien au-delà du mandat pour lequel il avait été nommé. C’est donc un gouvernement de transition qui a permis de mettre la Tunisie sur les rails de ces élections. Elles donnent raison à ceux qui ont cru à l’espoir soulevé par le printemps arabe, malgré le chaos et les difficultés.

Que penser de Nidaa Tounes ?

Béji Caïd Essebsi est un vieux renard de la vie politique tunisienne. Ministre sous Bourguiba, simple élu sous Ben Ali, retiré de la vie politique dans les années 90, il a gagné en popularité pour avoir bien géré, comme premier ministre, l’un des gouvernements provisoires de l’après révolution. Aidé par la peur des islamistes, il a réussi le tour de force de rassembler autour de lui à la fois des anciens du RCD et des gens bien plus à gauche. De ceux qui ont fait la révolution et veulent conserver ses acquis démocratiques, tout en craignant plus que tout les intégristes.

Le fait que Nidaa Tounes arrive en tête va permettre de sauver cette modernité, tout en conservant les acquis démocratiques. Surtout si Nidaa Tounes doit faire alliance avec un parti plus à gauche. Après les débats pour la survie du pays et l’affrontement entre laïcs et intégristes, le pays pourrait enfin connaître des débats plus classiques.

On espère déjà le jour où les Tunisiens pourront véritablement choisir entre un camp conservateur non dangereux, un centre et un véritable camp progressiste. En attendant, le « vote utile » a évité le pire. En chemin, il y aura encore de nombreuses crises politiques, des claquages de porte, des alliances étonnantes et des revirements… Mais c’est la loi de la démocratie. Si Nidaa Tounes parvient à les accepter sans céder à la tentation paternaliste, la Tunisie deviendra, après bien des sacrifices, la démocratie sûre que son peuple et sa société civile méritent.

Caroline Fourest

Plainte du père d’une femme voilée : Caroline Fourest fait appel

Le père d’une jeune femme voilée a obtenu gain de cause contre l’une de mes chroniques de France Culture. Alors que des sites victimaires sommaient « les féministes » de prendre positition contre l’agression de femmes voilées, j’ai pris volontiers position contre ces agressions… Tout en expliquant qu’il fallait les dénoncer en tant qu’antiracistes plus qu’en tant que féministes.

J’insistais aussi sur la nécessité d’attendre les résultats de certaines enquêtes. Des élus locaux doutant de la version d’agressions montées en épingle par des réseaux intégristes.

Pour avoir émis ce doute, le père d’une jeune femme voilée (qui nie influencer sa fille) a porté plainte et me réclame des dommages et intérêts. Radio France et moi-même faisons appel. Nous sommes confiants sur l’issue finale de cette procédure.

Bien entendu, si nous gagnons, les sites qui guettent et médiatisent la moindre plainte ou campagne de courriers contre moi (Oumma, Egalité et réconciliation…) auront à cœur de rectifier.

Caroline Fourest

 

 

Dernier édito video de Caroline Fourest : https://www.youtube.com/watch?v=-7i2geopVY4

Chronique « Faut-il être féministe pour dénoncer l’agression de femmes voilées ?«

Prochoix N°63 Les vassaux de Poutine. MLF : le détournement

Vassaux de Poutine
La nouvelle émergence d’une gauche pro-russe (Quentin Guillemain)
L’eldorado du Donbass (Tania Vlitko)
La trahison consiste à armer Poutine (Caroline Fourest)

MLF : le détournement
Mémoires non-alignés (Brigitte Galtier)
Antoinette Fouque au Panthéon (Michèle Baron-Bradshaw)
Le MLF et après (Raymonde C.)
Le pouvoir hypnotique de la domination féminine (Christine Fauré, Liliane Kandel, Françoise Picq.)
Encore ? Oui, hélas, encore ! Parce que tout n’a pas été écrit, loin de là (Nadja Ringart)
Du politique au personnel (Liliane Kandel)
Coupable ou non coupable ? (Martine Storti)
Allonge-toi, tu seras emballée (Jeanne Favret Saada)
Une révoltante tyrannie (Simone de Beauvoir)
D’une tendance…au détournement de l’histoire (Françoise Picq)
Morale de (et pour) l’Histoire (Caïne)

Enquêtes et décryptages
Genre et sexisme au lycée (Sophie Mazet)
Un été pourri à Paris (Ismaël Mazyar)
Une Nouvelle Donne…pour les conspirationnistes ? (Rudy Reichstadt)
Najat Vallaud-Belkacem face aux obscurantistes (Yves Delahaie)

On a lu. On a vu. On en parle
Jaurès et le réformisme révolutionnaire
Le Front National de 1972 à nos jours (Seuil)
Mes parents se font la guerre
L’état nucléaire

Inde : 92 femmes violées par jour en 2013 Venezuela : journaux affectés par la pénurie de papier (RSF)
Un camp de jeunesse organisé par Amnesty International interdit par les autorités marocaines
Le Droit à l’IVG exclu de la nouvelle loi sur le développement et la solidarité internationale !
Le Conseil Constitutionnel a validé l’assouplissement de la loi relative à l’IVG
Les Femen relaxées pour l’action de Notre Dame
Repression homophobe en Egypte
Mgr Desmond Tutu sur la fin de vie
Maroc : Communiqué de soutien à Wafa Charaf

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Amina enfin honnête

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Je suis heureuse et soulagée qu’Amina ait eu le cran de dire qu’elle avait menti sur sa première agression dans une lettre ouverte. Elle parle d’un « appel au secours » et réalise, enfin, qu’il s’agissait surtout d’une trahison.

Quand la nouvelle de sa première agression (Place Clichy) est sortie dans la presse, mon premier réflexe a été de lui envoyer un message de soutien comme féministe, le second fut d’attendre d’en savoir plus avant d’écrire sur cette affaire comme journaliste. Finalement, j’ai décidé de ne rien écrire. Trop d’incohérences dans son récit et trop de mauvaises expériences avec Amina par le passé.

Des collègues m’ont tout de suite appelée pour me demander s’ils pouvaient la croire. Je les ai invités à la plus grande prudence. J’ai même refusé de donner des entretiens à ce sujet. Aux politiques qui voulaient soutenir Amina, j’ai conseillé d’attendre le verdict des caméras de surveillance… qui s’est révélé implacable (mais nous ne l’avons su que tardivement). Amina est d’ailleurs poursuivie (à juste titre) pour « dénonciation calomnieuse » et la presse, déjà méfiante, s’en est fait largement l’écho.

Contrairement à ce qu’écriront les soutiens habituels du sexisme et de l’obscurantisme qui vont se régaler de cette affaire, il n’y a pas eu d’emballement médiatique, bien au contraire. Son récit a été accompagné d’une très grande suspicion dans la presse, dès le début. Au point que lorsqu’Amina a réellement été agressée à Bastille, la presse a jugé — cette fois à tort — qu’elle avait « agressé une femme voilée » en se basant sur l’unique version de la police (échaudée par le mensonge d’Amina à propos de la Place Clichy). Elle a simplement répondu à un homme l’ayant traitée de « sale pute » avant de se faire frapper, ainsi qu’un copain (qui n’est pas son compagnon contrairement à ce qui a été écrit), par les amis de cette femme voilée, bien plus nombreux. Des témoins, depuis, ont rétabli la vérité. Mais la presse s’est emballée et une dépêche AFP a donné une version erronée de cette bagarre à partir d’une version policière biaisée.

La faute à qui ? A Amina. Rien, ni sa situation (qui est loin d’être aussi solitaire qu’elle le décrit, elle a bénéficié de très nombreux soutiens dès son arrivée en France, malgré ses déclarations délirantes tenues en Tunisie contre Femen et ceux qui s’étaient mobilisés pour elle), ni les épreuves subies ne justifient — elle le reconnaît — de jeter le soupçon sur la parole des femmes ou de semer la division gratuitement dans un pays déjà si tendu par de véritables agressions, souvent tues.

J’en profite pour faire une mise au point à l’intention de ceux qui ne comprennent pas mon lien avec Amina ou Femen. Il est très simple. J’ai soutenu Amina quand elle s’est levée contre le sexisme et l’intégrisme en Tunisie, envers et contre beaucoup, et je ne le regrette pas le moins du monde. Ce qu’elle a accompli, avec les Femen, est historique. Grâce à elles, on a pu dénoncer haut et fort le sort des prisonniers politiques et la chasse aux féministes et laïques qui sévissait sous le règne de la troïka unissant Ennahdha et ses alliés alibis.

J’ai soutenu Femen à son arrivée en France et je ne le regrette pas. Ce qu’elles ont accompli pour dénoncer le trafic de femmes en Ukraine, l’autoritarisme de Viktor Ianoukovitch, était historique et annonciateur du printemps ukrainien. Leurs provocations ont permis de réaliser le poids qui pèse sur le corps et les seins des femmes, à l’est comme au sud, en Occident comme en Orient. Avec leurs seins, elles ont défié aussi bien les intégristes musulmans que les intégristes chrétiens de Civitas, les députés espagnols voulant abroger le droit à l’IVG et les sénateurs français n’ayant pas voulu sanctionner les clients alimentant la prostitution. Avec panache et parfois excès, mais c’est le propre de toute provocation. Des provocations bien pacifiques au regard de ceux qu’elles ont défiés et souvent vaincus (mais pas toutes seules contrairement à ce qu’elles semblent penser).

Leur maladresse parfois infantile comme à Notre-Dame ou lors du Jihad Topless, le rétrécissement du mouvement à une seule leader, l’infantilisation de certaines militantes et le changement d’époque en Ukraine m’ont convaincue qu’elles avaient été utiles à bien des causes, mais qu’elles tournaient en rond. Leurs excès commençaient à faire plus de mal que de bien. J’ai donc pris le large.

Ma rupture politique puis personnelle remonte aux derniers mois de l’écriture du livreINNA, il y a plus d’un an. Très peu ont compris combien ce livre n’était pas une romance mais au contraire un livre de rupture, écrit avec le souci d’être, malgré tout, le plus juste possible.

En tant qu’éditorialiste et écrivaine, je tiens toujours à distinguer, presque maladivement (et c’était aussi l’objet d’INNA, avec l’Ukraine), ce qui relève de l’affectif et du politique, de l’engagement et du professionnalisme, de l’empathie et de la justesse des faits… Presque de la « justice des faits ». Comme une guerre intérieure, entre la passion que l’on doit mettre pour tenir bon et s’engager, et la raison qui doit être in fine notre seule conseillère quand on bataille avec une plume et non une épée.

On finit par se forger une règle. Par exemple, quand j’approuve une action de FEMEN, je le dis. Quand je la désapprouve, je le dis aussi. Quelle que soit mon humeur, tendre ou fâchée, vis-à-vis de ce groupe, ou d’Amina. Bien qu’elles aient perdu ma confiance, depuis longtemps, elles garderont toujours ma tendresse. Parce que, malgré leur jeunesse et leur maladresse, qu’elles ont payées (par des coups, des gardes à vue, de la prison et des menaces de mort quotidienne, réelles et non fictives), elles tiennent tête au sexisme, à la dictature et à l’obscurantisme. Rares sont ceux qui ont ce cran. Mais ce combat, si noble soit-il, demande de penser aux autres et à sa cause avant soi, de ne pas trahir, d’inspirer la confiance pour convaincre. Quand la confiance est brisée, c’est du courage gâché. Or la confiance est brisée.

Caroline Fourest est l’auteure de INNA (Grasset), qui raconte les espoirs et les désillusions du mouvement FEMEN à travers sa leader Inna Shevchenko, depuis l’enfance en Ukraine jusqu’aux combats contre CIVITAS à Paris en passant par les campagnes avec Amina en Tunisie.

Inde : 92 femmes violées par jour en 2013

Un rapport officiel vient de publier les chiffre du nombre de viols déclarés en 2013.

Selon le Bureau national de recensement des crimes (NCRB), le nombre de viols est de 33 707 en 2013, un chiffre en hausse par rapport aux 24 923 viols enregistrés en 2012

À New Delhi, le nombre de plaintes a doublé. 1 636 viols ont été signalés en 2013, contre 706 cas avaient en 2012.

À Bombay, 391 ont été signalés en 2013.

Alain Soral. Itinéraire d’un gigolo sémantique. (Fiammetta Venner)

En une génération, ce fils de notable, ancien élève du lycée Stanislas, est passé du PC au FN. Journaliste à Libération, il a dû démissionner en 1993 à cause, déjà, de positions douteuses. Notamment en raison d’un article paru dans L’Idiot International sous le titre « vers un Front National ». Dans ce texte signé Jean-Paul Cruse — mais mis en avant par Soral — on appelle à « un violent sursaut de nationalisme, industriel et culturel » contre l’ultralibéralisme mondialisé illustré par « Wall Street, le sionisme international, la bourse de Francfort et les nains de Tokyo », ainsi qu’à « une politique autoritaire de redressement du pays », liant les problèmes de l’immigration, du chômage et de l’insécurité urbaine.

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Prochoix n°60, décembre 2013

Alain Soral. Itinéraire d’un gigolo sémantique. (Fiammetta Venner)

En une génération, ce fils de notable, ancien élève du lycée Stanislas, est passé du PC au FN. Journaliste à Libération, il a dû démissionner en 1993 à cause, déjà, de positions douteuses. Notamment en raison d’un article paru dans L’Idiot International sous le titre « vers un Front National ». Dans ce texte signé Jean-Paul Cruse — mais mis en avant par Soral — on appelle à « un violent sursaut de nationalisme, industriel et culturel » contre l’ultralibéralisme mondialisé illustré par « Wall Street, le sionisme international, la bourse de Francfort et les nains de Tokyo », ainsi qu’à « une politique autoritaire de redressement du pays », liant les problèmes de l’immigration, du chômage et de l’insécurité urbaine.

 

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M. Hamon, généralisez les ABCD de l’égalité !

Nous, associations de promotion de l’égalité femmes-hommes, association de parents d’élèves, syndicats des personnels de l’Éducation nationale, d’étudiant-es et de lycéen-nes, attendons de pied ferme l’annonce de la généralisation du dispositif des « ABCD de l’égalité », à la veille des déclarations de Benoît Hamon sur le sujet.
Nous voulons la généralisation des ABCD parce qu’ils sont efficaces ! Ils interrogent les enseignants et enseignantes sur leurs représentations et leurs pratiques. Ils questionnent les enfants sur leurs imaginaires et leurs projections, d’eux-mêmes et des autres. Et mettre en cause les stéréotypes de sexe, c’est enrayer la machine à inégalités ! Les ABCD font vivre concrètement cet idéal d’égalité, fièrement affiché sur les frontons de nos écoles publiques.
Nous voulons la généralisation des ABCD parce que le bilan des 30 ans de politiques publiques d’éducation à l’égalité est insuffisant et qu’il y a urgence à agir ! A-t-on besoin de rappeler qu’aujourd’hui encore, la majorité des femmes est cantonnée dans moins de 15% des filières professionnelles ? Que malgré leur fort taux de réussite scolaire, les femmes gagnent encore 27% de moins que les hommes ? A quoi bon inciter les lycéennes à s’orienter vers des filières d’ingénieur si les stéréotypes de sexe ne sont pas déconstruits ? N’est-ce pas le rôle de l’école ?

UN MONDE SANS DISCRIMINATION SEXISTE

Nous voulons la généralisation des ABCD parce que nous attendons depuis trop longtemps une légitimité institutionnelle et perdons patience ! Nous portons tant bien que mal et à bout de bras l’égalité depuis des décennies. Chacun à notre niveau, nous organisons des journées de l’égalité par-ci, des réunions de sensibilisation par là. Sans moyen humain ou financier à hauteur de cet enjeu. Portés par notre volonté de construire un monde sans discrimination sexiste. Nous avons aujourd’hui besoin d’un appui, de poser les fondamentaux qui nous permettent de poursuivre notre action.
Nous voulons la généralisation des ABCD parce que renoncer aux engagements est désastreux pour la démocratie et qu’il en va du bien-être des enfants. Votre volonté affichée de faire de l’égalité un marqueur identitaire de votre politique a soulevé l’espoir de voir se concrétiser le projet de progrès qui nous rassemble : faire grandir cette société égalitaire. Cette volonté pourrait donc être tuée par le lobbying de quelques organisations réactionnaires, dont le projet ne trouve aucune convergence avec celui que vous nous aviez promis de défendre ?
Nous voulons la généralisation des ABCD parce que ce dispositif est innovant. Il est salutaire. Et il a fait ses preuves sur le terrain. Il sera complémentaire des efforts à poursuivre sur la formation initiale et continue des enseignant-e-s et sur les programmes. Car pour changer d’échelle enfin, il faut des temps dédiés au sujet, des outils dédiés, un accompagnement des enseignant-e-s dédié, et un véritable portage politique ! C’est en articulant une action transversale – programme et formation des enseignants – et spécifique – dispositifs dédiés en classe – que l’égalité progressera.

M. Hollande, M. Valls, M. Hamon, Mme Vallaud-Belkacem, vous allez prochainement décider du sort qui sera réservé à ce dispositif de l’égalité. Nous comptons sur vous pour poursuivre la politique d’éducation à l’égalité, la déployer à l’ensemble du territoire, et l’inscrire dans la durée. Cette politique passe notamment par la généralisation des ABCD.

Premier-e-s signataires

Associations
Osez le féminisme !, Collectif éducation contre les LGBTphobies en milieu scolaire et universitaire (regroupant FCPE, Fep-CFDT, Ferc-CGT, FSU, Sgen-CFDT, Sud éducation, UNEF, FIDL, UNL), InterLGBT , ARGEF (Association de Recherche pour le Genre en Education et Formation), ANEF (Association nationale des études féministes), Femmes Ingénieurs, Femmes & Sciences, Femmes et mathématiques, Institut Emilie du Châtelet pour le développement et la diffusion des études sur les femmes, le sexe et le genre, Collectif « Genre, recherche, éducation », équipe genre & éducation, ESPé UT2, Centre EPS et Société, Les Féministes en Mouvement, Association FIT, une femme, un toit, l’Assemblée des femmes , Fédération Nationale Solidarité Femmes, Réussir l’égalité femmes-hommes, Le Planning Familial (MFPF), Association Du côté des Femmes, Les Enfants d’Arc en Ciel – l’asso, Centre LGBT Paris-Île-De-France, le Long Yang Club – Paris, Collectif National Droits des Femmes, Collectif Féministe Contre le Viol, CRIFIP et Le monde à Travers un Regard, Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir, Féminisme et Géopolitique, FièrEs

Chercheur-se-s, enseignant-e-s et personnalités
Salle Murielle Maîtresse de conférences en histoire contemporaine (Université Claude Bernard Lyon 1 – ESPE de Lyon), Responsable de la mise en œuvre de l’ABCD de l’Egalité dans l’Académie du Rhône ; Vouillot Françoise Maîtresse de conférences en psychologie de l’orientation, Membre du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, Vidal Catherine neurobiologiste, directrice de recherche à l’Institut Pasteur ; Mercader Patricia Professeur de psychologie sociale, Chargée de mission Egalité Femmes-Hommes, Université Lumière-Lyon 2 ; Favre Cécile Maîtresse de conférences en informatique à l’université Lyon 2. Responsable locale des Masters EGALES et EGALITES ; Zancarini-Fournel Michelle PR émérite histoire des femmes et du genre,universite Lyon1,Comité de rédaction de CLIO FGH ; Mennesson Christine Sociologue, Directrice du laboratoire PRISSMH-SOI, Vice-présidente à l’Egalité Active, Université Paul Sabatier Toulouse III ; Molinier Pascale Professeure de psychologie sociale, Directrice de l’UTRPP Université Paris 13, Sorbonne Paris Cité ; Lapeyre Nathalie Université Toulouse Jean Jaurès MCF sociologie du genre ; Declercq Christelle Vice-presidente Ressources humaines et relations sociales Université de Reims Champagne-Ardenne ; Collet Isabelle Maître d’enseignement et de recherche, Groupe Relations Interculturelles et Formation des Enseignants – Genre et Education (Grife-ge), Université de Genève ; Pezeu Geneviève Formatrice égalité femmes/hommes et citoyenneté, $Coordinatrice de recherche ; Gosset Stéphanie doctorante à l’Université de Tours, psychologue sociale ; Ottogalli Cécile historienne du sport, Université de Lyon1 ; Boehringer Sandra historienne, Université de Strasbourg ; LECHENET Annie MCF à l’Université Lyon 1 – ESPE, membre du groupe GEM (Genre Egalité Mixité) de l’ESPE de Lyon, et co-responsable de la recherche ANR « Pratiques genrées et violences entre pairs : les enjeux socio-éducatifs e la mixité au quotidien dans les établissements scolaires » ; Tain Laurence MCF socio Lyon2, Marie Cervetti, Directrice de l’association FIT, une femme, un toit , Membre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Françoise Brié Porte Parole FNSF, Bastide Karine enseignante, Bertrand Karine professeure de lettres-histoire en lycée professionnel, Blanchard Valérie Enseignante, Dorvaux Karine professeure des écoles, Bourdier-Porhel, Isabelle professeurs d’histoire-geographie, Chignier Marianne enseignante en maternelle dans l’Yonne, Brodziak Sylvie enseigante-chercheure, Chaperon Sylvie Professeure d’histoire contemporaine du genre, Université de Toulouse Jean Jaures, Morenas Stella Enseignante, Caroline de Haas, militante Féministe, Martine Storti Inspectrice générale de l’éducation nationale honoraire, Dutrop-Voutsinos Violaine Présidente fondatrice de l’Institut EgaliGone, Chaouat Gerard directeur recherches émérite cnrs, SNCS FSU, Eric Piolle, maire de Grenoble et les élu-e-s de la majorité municipale

Les signatures restent ouvertes, si vous souhaitez ajouter la vôtre, merci de compléter ce formulaire https://docs.google.com/forms/d/1MoDX3uW2CRBwYbepD-uVmNM9L9lNRNqKXJo6mbO…