Dieudonné, le fond Dutroux

La défense de la liberté d’expression de Dieudonné a été une cause unificatrice ces dix dernières années. L’extrême-droite n’a pas été la seule à affirmer qu’on avait le droit de tout dire. Tout un pan de la gauche, tout en condamnant les saillies les plus caricaturales du politique néo-nazi, a toujours répété que la loi ne devrait pas sanctionner des paroles. D’autres admettaient une condamnation judiciaire, mais pas les mesures permettant de faire cesser immédiatement des appels réitérés et prévisibles à la haine raciale.

 

Depuis le lundi 4 mai , sur le site « Quenel Plus » de Dieudonné, s’affiche ce qui est présenté comme un entretien avec Patrice Alègre, actuellement détenu à la centrale de Poissy pour cinq meurtres, une tentative de meurtre et six viols qu’il a reconnus. Dieudonné affirme depuis plusieurs années animer un « atelier » dans cette centrale avec d’autres personnes condamnés pour meurtres et tortures , dont Germain Gaiffe, présenté comme le directeur de publication de Quenel Plus. Depuis quelques semaines, il annonçait son rapprochement avec Patrice Alègre.

 

Apocryphe ou non, le contenu de cet « entretien » est difficilement soutenable à la lecture. Dans un premier temps, le texte s’attaque à l’enfant en situation de handicap de Laurent Louis, politicien antisémite belge avec lequel Dieudonné s’est récemment brouillé pour une affaire de gros sous liée au lancement d’une entreprise baptisée l’Ananassurance. « Morte née accrochée au fion de sa mère », « cancrelat tout désarticulé », «  baignant dans sa pisse et dans ses excréments » sont quelques uns des qualificatifs utilisés. Dans la suite du texte, l’auteur appelle au meurtre à coup de pelle de l’enfant. Dans la suite de l’article, c’est l’assassinat récent d’une petite fille violée qui est évoquée dans des termes tout aussi insoutenables, accompagnés du prénom de l’enfant.

 

Pour lire la suite 

 

 

L’association MEMORIAL98, qui combat contre le racisme, l’antisémitisme et le négationnisme a été créée en janvier 1998, lors du centenaire de l’affaire Dreyfus.  

Son nom fait référence aux premières manifestations organisées en janvier 1898, pendant l’affaire Dreyfus, par des ouvriers socialistes et révolutionnaires parisiens s’opposant à la propagande nationaliste et antisémite.

Ce site en est l’expression dans le combat contre tous les négationnismes

(Arménie, Rwanda, Shoah …)

Arkansas : Liberté religieuse contre Liberté individuelle

La législature de l’Arkansas a voté une loi de « restauration de la liberté de religion ».

Plusieurs états ont décidé de faire de même. Il s’agit d’empêcher les pouvoirs publics d’entraver la liberté de religion des citoyens. Et dans ce cas d’autoriser la discrimination au nom du religieux.

Grâce à ce type de lois, un commerçant qui refuserait de servir des clients gays en raison de ses convictions religieuses, ne pourrait pas être condamné pour discrimination.

 

Affaire Saïd Bourarach : 4 à 9 ans d’emprisonnement

Le site de Itélé reprend point par point l’affaire et l’enquête qui a suivi. Le déroulement des faits. L’émotion. L’instrumentalisation. L’enquête. Le procès. Le verdict.

http://www.itele.fr/justice/video/les-agresseurs-de-said-bourarach-ont-ecope-de-4-a-9-ans-demprisonnement-117280

 

Le procès de quatre hommes a eu lieu devant la Cour d’assises de Seine-Saint-Denis ces derniers jours, accusés d’avoir provoqué la mort de Saïd Bourarach, vigile marocain de 35 ans qui s’était noyé dans le canal de l’Ourcq après une banale altercation dans le magasin de bricolage où ce dernier travaillait. Agés de 23 à 30 ans, les accusés comparaissaient libres pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, avec usage ou menace d’une arme ». La mort de Saïd Bourarach, il y a maintenant cinq ans, avait provoqué une vive émotion, notamment au sein de la communauté musulmane.

Que s’est-il passé ce 30 mars 2010 ?

Peu après 19h00, alors que le magasin de bricolage Batkor de Bobigny s’apprête à fermer, Saïd Bourarach refuse l’entrée à un jeune homme de 19 ans qui se présente pour acheter un pinceau et un pot de peinture. Il est alors pris à partie, prend au moins un coup au visage et riposte avec sa bombe lacrymogène. Econduit, son agresseur part alors se saisir d’une manivelle à cric dans le coffre de sa voiture et appelle en renfort son frère, habitant une cité voisine à Pantin, qui arrive sur place avec un cousin et des amis.

La dispute se poursuit, le vigile prend la fuite en courant vers le canal situé derrière le magasin. Les quatre accusés le pourchassent et c’est à partir de ce moment précis que les hypothèses divergent. Le but de ce procès était de faire la lumière sur ce qui a provoqué la mort de Saïd Bourarach.

La victime a subi « une pression psychologique » de la part de ses agresseurs

Les accusés ont toujours soutenu que le vigile s’était noyé après s’être volontairement jeté dans le canal, mais la justice leur reproche d’avoir exercé sur lui une « pression psychologique » telle qu’il n’aurait eu d’autre choix que le saut pour leur échapper. Cette version est corroborée par les rares témoins de la scène, qui ont décrit aux enquêteurs un homme alors « apeuré », « à bout de souffle ».

Pour Nathalie Potignon, la veuve de Saïd Bourarach, le procès doit aller plus loin : a-t-il été frappé avant de tomber ? A-t-il été poussé dans le canal ? Elle et son avocat contestent en effet qu’il ait pu sauter « de son propre chef ». 

S’agissait-il d’une agression à caractère raciste ?

L’avocat des proches de Saïd Bourarach a mentionné au cours du procès « l’appartenance à la Ligue de Défense Juive (LDJ) » d’un des accusés. L’enquête, de son côté, n’a ni établi d’agression à caractère raciste, de la part de la victime comme des accusés, ni établi de supposée appartenance de ces derniers à la LDJ.

Pour l’avocat du principal accusé, Me Paul Le Fèvre, ce dossier résulte « d’une bagarre idiote qui se solde par un accident mortel que personne n’a voulu », et une affaire qui ne méritait pas d’aller aux assises.

Trois des accusés sont arrivés libres au tribunal. Le quatrième accusé, absent, a été jugé par défaut, comme l’a précisé la présidente du tribunal au début du procès. Ces accusés ont pris place dans une salle comble, composée de proches de la victime et de personnes revêtant des tee-shirts « Justice pour Saïd ».

Arguant du « caractère raciste » de l’agression, les accusés étant de confession juive, des manifestants se sont également rassemblés durant le procès pour demander la « justice pour Saïd ». 

Selon Dan Lampel, l’accusé à l’origine de l’altercation, âgé de 19 ans à l’époque des faits, il portait une étoile de David autour du cou et Saïd Bourarach lui aurait rétorqué, face à son insistance pour rentrer dans le magasin, « j’ai pas deux-trois minutes pour ta race ». Des propos « incroyables » pour la nièce de la victime, qui a témoigné de ses « valeurs », ajoutant que ce père de famille maîtrisait mal le français et qu’il aurait été plus enclin à parler en arabe sous l’énervement.

Quel portrait a été tiré du principal accusé lors du procès ?

L’un des accusés, Dan Lampel, 23 ans, à l’origine de l’altercation, a indiqué « regretter amèrement ce qui s’était passé, pour tous les gens qui sont là ». 

A la barre, il a retracé son histoire: benjamin d’une fratrie de six enfants, qui n’aime pas trop l’école, préfère les filles et les motos, et qui a perdu son père à l’âge de 10 ans. Sa famille, qui connait après le décès du père des difficultés financières, vit dans « le respect des traditions » juives, mange casher, mais n’est pas vraiment pratiquante, selon les témoignages des deux frères. 

Décrit par tous comme « nerveux », « impulsif », Dan porte plusieurs condamnations à son casier judiciaire, notamment pour violences. Il indiquera qu’à « 20 ans, on a rien dans la tête ». « J’ai été jeune et stupide », poursuivra-t-il.

En 2011, quelques mois après sa sortie de détention provisoire, il a été condamné après une dispute avec le gardien d’un parc parisien. Selon le procès-verbal lu par une avocate des parties civiles, Me Dominique Cochain, il aurait menacé et insulté la victime de « sale noir ». 

« Avez-vous des activités religieuses ? Intégré une Ligue ? » a demandé inlassablement la présidente à tous les accusés, qui ont répondu par la négative, assurant « ne pas être racistes » et avoir des amis de « tous horizons ».

De son côté, l’avocat de la défense, Me Paul Le Fèvre, a estimé que « des mots très durs ont été lancés dans cette affaire par des gens qui n’avaient pas accès au dossier, qui ne savaient pas ce qui s’était passé ». « On a parlé de « gang des barbares de Pantin », on a parlé de rats, on a parlé d’assassins qui auraient jeté Saïd Bourarach dans le canal comme un chien ».

« On m’a tout enlevé, depuis qu’il est parti, c’est moi qui suis en prison »

Appelée à son tour à témoigner, la veuve de Saïd Bourarach, Nathalie Potignon, a décrit le portrait d’un « père aimant », « généreux », « tolérant », « toujours prêt à porter secours », avant de s’adresser aux accusés, leur demandant la « vérité », pour pouvoir « faire son deuil ». 

« Ça fait très longtemps que je souhaite ce moment-là. Depuis cinq ans, je n’ai pas une vie normale. On m’a tout enlevé, depuis qu’il est parti, c’est moi qui suis en prison ».

Saïd était musulman de confession, arrivé au Maroc dix ans avant les faits, « pas spécialement pratiquant », « tolérant », « aimant rentrer dans les églises ». 

« Aujourd’hui, je réclame la justice, la vérité. Pour pouvoir faire mon deuil et que mon fils grandisse dans la paix, sans haine contre ceux qui ont tué son père », a-t-elle ajouté.

« J’aurais préféré être à la place de Saïd Bourarach »

Dan Lampel, l’accusé à l’origine de l’altercation, est apparu « très mal à l’aise » selon ses propos, après le témoignage de la veuve de Saïd Bourarach.

« J’ai beaucoup de peine. Depuis cinq ans, on me fait passer pour quelqu’un que je ne suis pas. Il y a eu des vidéos mensongères, j’ai été menacé par le clan Dieudonné, Alain Soral. Croyez-moi, j’ai pleuré beaucoup de fois pour votre fils, moi aussi j’ai perdu mon père très jeune. Si je suis là, c’est pour que vous sachiez la vérité. Je ne vais pas m’enfuir », a-t-il ajouté s’adressant à Nathalie Potignon.

 « J’aurais préféré être mort que vivre avec ça, que voir mon frère et mon meilleur ami en prison. Ce n’est pas un crime racial Madame, c’est un drame » a-t-il ajouté. « Ce jour-là j’ai fait la bêtise d’appeler quelqu’un. J’aurais dû partir ».

Des peines de 5 à 12 ans requises

Des peines allant de 5 à 12 ans de prison ont été requises mercredi à Bobigny à l’encontre des quatre hommes, jugés pour avoir entraîné la noyade de Saïd Bourarach dans le canal de l’Ourcq en 2010.

« Si la victime n’était pas musulmane, si les accusés n’étaient pas juifs, cela aurait pu rester un tragique fait divers et ne pas attirer l’attention médiatique. Mais ce dossier n’est pas celui du racisme ou de l’antisémitisme, nous n’en avons que le fantasme », a déclaré Anne Haller, la représentante du ministère public. 

« On ne reproche pas ici aux accusés un mobile raciste, on ne leur reproche pas non plus d’avoir voulu la mort de ce vigile, on leur reproche des violences physiques et psychologiques qui ont causé cette mort », a poursuivi Mme Haller, revenant sur une enquête de cinq ans « complète » et « rigoureuse ».

« C’est un drame humain, celui d’un homme qui court le long de la berge pour échapper à ses assaillants et qui saute justement parce qu’il veut vivre », a estimé la magistrate. 

Soulignant qu’une course poursuite « constitue des violences », elle a également évoqué les traces de coups inexpliquées sur le corps de la victime. « La scène de crime, c’est le corps de M. Bourarach, qui porte les stigmates d’une agression. Ce n’est pas parce que personne n’a vu les coups, qu’ils n’existent pas », a-t-elle dit. 

A l’encontre de Dan Sellam, qui n’a eu de cesse de minimiser son implication, elle a requis cinq ans d’emprisonnement. Pour Lucien Dadoun, jugé par défaut car il ne s’est pas présenté, et Michaël Lampel, elle a demandé six ans d’emprisonnement. Enfin, à l’encontre de l’accusé à l’origine de l’altercation, Dan Lampel, elle a requis douze ans.

Des peines de 4 à 9 ans d’emprisonnement prononcées à l’encontre des quatre hommes

Les quatre hommes âgés de 24 à 30 ans ont été condamnés jeudi à des peines allant de quatre à neuf ans d’emprisonnement. Devant une salle comble, encadrée par un important dispositif policier, la cour d’assises de Seine-Saint-Denis a rendu son verdict dans un climat tendu. 

Elle a estimé que Dan Sellam, Michaël Lampel, Lucien Dadoun et Dan Lampel étaient responsables de violences, commises avec arme et en réunion, qui ont entraîné la mort de Saïd Bourarach. Elle les a condamnés respectivement à des peines de quatre, cinq, six et neuf ans d’emprisonnement.

Se disant « satisfaite » de sanctions « normales au regard du dossier », Dominique Cochain, avocate de la nièce et du frère de Saïd Bourarach, a néanmoins déploré « l’absence de deux accusés, notamment le principal mis en cause qui n’a pas assumé » : à l’origine de l’altercation, Dan Lampel, 24 ans, a comparu aux côtés de son frère et d’un ami tout au long du procès mais ne s’est pas présenté jeudi matin. La cour a délivré un mandat d’arrêt à son encontre. 

Le quatrième accusé, Lucien Dadoun a, lui, été absent des débats et son mandat d’arrêt est maintenu, a précisé la présidente Xavière Simeoni. 

A l’énoncé du verdict, les deux accusés restant, apparus les mines graves, et leurs familles se sont effondrés. En réponse, des personnes ont applaudi et crié « justice », rapidement contenues par les policiers. Les avocats de la défense n’étaient pas disponibles dans l’immédiat pour évoquer un possible appel, selon l’AFP.

Ces progressistes qui crachent sur les morts du 7 janvier

Nous sommes le 5 mars et à ma connaissance, contrairement à EELV, le Parti communiste Français n’a toujours pas retiré sa signature d’un appel à une manifestation « contre l’islamophobie et le climat de guerre sécuritaire » en compagnie d’organisation intégristes ou proches des Frères musulmans comme l’UOIF, Présence musulmane, le CCIF (qui classe tout propos laïque comme « islamophobes »), le Parti des Indigènes de la République, les Indivisibles, Oumma.com, Junta islamica (indiquée seulement sur le tract)…

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Que le NPA et ATTAC maintiennent leur signature, cela ne surprendra personne. Il y a longtemps que ces deux organisations ont cédé aux alliances douteuses sous prétexte de séduire « les quartiers populaires » (réduits à leur seule expression religieuse et réactionnaire). L’alliance nouée avec Tariq Ramadan lors de différents Forum Sociaux n’a fait que transformer certains ateliers altermondialistes en tribunes intégristes, tout en faisant fuir les plus progressistes… Ce n’est pas un hasard si ces deux organisations sont en perte d’adhérents et de dynamique, totalement décrédibilisées, dans une période où la critique du capitalisme financier est pourtant plus partagée et a besoin d’eux.

Mais que fait le PCF ? Quand j’ai vu sa signature au bas de cet appel, j’ai cru au dérapage d’une section. Quelques jours plus tôt, nous étions entourés de militants du PCF pour enterrer Charb. Dans les travées, il n’y avait pas assez d’agents pour nous protéger. Il n’y en a toujours pas assez. Les équipes de protection sont débordées par le nombre de cibles à abattre, d’amis menacés, en pleine explosion… C’est pourtant « le sécuritaire » que le PCF rend responsable de ce « climat de guerre », pas le terrorisme, en compagne d’organisation islamistes.

L’UOIF, avec qui ils signent, a milité contre le mariage pour tous, porté plainte contre Charlie Hebdo lors de l’affaire des caricatures et son théologien de référence, Youssef al Qaradawi, propose de brûler les homosexuels et autorise les attentats kamikazes contre les Juifs…

C’est avec eux qu’ils veulent donc combattre l’« islamophobie » : ce concept fumeux confondant racisme et blasphème, transformant tout laïque en cible, que Charb dénonce dans son dernier livre (1). Faut-il rappeler qu’il paraîtra à titre posthume ?

 

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En signant cet appel, le PCF crache sur sa tombe et celle des victimes de l’attentat du 7 janvier. Odieux. Comme l’est la signature d’un collectif se revendiquant du Front de gauche (le Parti de Gauche n’a pas signé en tant que parti) : « Ensemble ».

« Ensemble » contre le fait de nous protéger ? « Ensemble » pour nous traiter d’ « islamophobes » ? « Ensemble » pour refuser le droit au blasphème ? « Ensemble » pour légitimer l’intégrisme et l’extrême droite musulmane ? « Ensemble » pour refuser de soutenir Charlie Hebdo comme l’a fait le Parti des Indigènes de la République au lendemain de l’incendie du journal en 2011 ? « Ensemble » pour demander au Qatar de racheter Charlie Hebdo pour éviter les caricatures blasphématrices envers Mahomet comme l’a fait Les Indivisibles à la même période ?

En tout cas, les Indigènes de la République et les Indivisibles ont eu bien raison d’attaquer physiquement la conférence que le PCF m’avait demandé de donner à la « Fête de l’humanité » sur l’extrême droite il y a trois ans. Le SO a eu si peur qu’on m’a escorté vers la sortie. Depuis, je n’ai plus été invitée à la fête de l’Huma mais le PCF signe avec ces adversaires de Charlie, juste après l’attentat, contre « l’islamophobie et le climat de guerre sécuritaire ».

La prochaine étape, c’est quoi, nous traiter de « sales pédés » et nous jeter du haut d’un mur ? Tenir la kalachnikov ?

Caroline Fourest

(1) « Lettres aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des communautaristes et des racistes », Charb, Les Echappés.

 

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Soutien féministe à Frederique Calandra, maire du 20e arrondissement

Nous soutenons la décision prise par Mme Frédérique Calandra, maire du 20e arrondissement de Paris, d’annuler les débats prévus pour le 8 mars[1]

 

Ces débats avaient en effet été organisés de manière à ne laisser la parole qu’à une seule vision politique, un féminisme controversé qui partage les idées du Parti des Indigènes de la République. Cette vision disqualifie les valeurs de la citoyenneté démocratique et le féminisme universaliste  au prétexte qu’ils seraient portés par des « blancs occidentaux ». Il dévalorise du même coup les luttes féministes pour l’accès aux droits humains, à l’égalité et à la liberté, qui se développent dans d’autres pays (hors Occident)

 

Une telle position enferme les individus dans des assignations identitaires et va à l’encontre de l’idéal d’autonomie qui fonde le féminisme.

 

Des débats de cette nature ne seraient propices ni à la réflexion critique ni à la création d’une intelligence collective des questions brûlantes qui se posent à tous, femmes et hommes, français ou non, « blancs » ou non.

 

Suite aux attentats des 7, 8 et 9 janvier, il n’était pas concevable pour une institution publique, de donner la parole sans débat contradictoire, et donc de soutenir des positions politiques dont les représentantes sont au mieux restées silencieuses face à l’assassinat des journalistes et dessinateurs de Charlie Hebdo, des policiers et des juifs, au pire ont pris la parole pour relativiser ces crimes.

 

Nous avons toutes participé au Mouvement de libération des femmes, certaines depuis le début des années 70. Ensemble, nous saluons aujourd’hui, en mars 2015, le courage de Frédérique Calandra, une élue qui a fait preuve de cohérence par rapport aux valeurs qui nous sont communes: liberté, égalité, solidarité, laïcité.  Et nous espérons que beaucoup d’autres mairies témoigneront de la même détermination dans leur défense.

 

 

Premières signataires :

 

Catherine Deudon, photographe auteur de Un mouvement à soi : Images du mouvement des femmes, 1970-2001, 2002, Syllepse ;

Liliane Kandel, co-auteur des chroniques du « Sexisme ordinaire » (à l’initiative de Simone de Beauvoir), les Temps modernes, 1973-1983 ;

Christine Le Doaré, présidente de Sos-Homophobie de 1998 à 2002 et du Centre LGBT Paris-IdF de 2005 à 2012 ;

Claudie Lessellier, responsable du Rajfire (Collectif féministe d’action et de solidarité avec les femmes migrantes et exilées) et co-présidente de la Maison des femmes de Paris ;

Françoise Picq, auteur de Libération des femmes, quarante ans de mouvement, 2011, Dialogues ;

Nadja Ringart, co-auteur de Mouvement de Libération des Femmes : Textes premiers, 2009, Stock ;

Annie Sugier, Présidente de la Ligue internationale du Droit des Femmes, (fondée par Simone de Beauvoir ), et Vice-Présidente de la Coordination Française du Lobby Européen des Femmes (CLEF) ;

Ioana Wieder-Atherton, co-fondatrice en 1982 avec Carole Roussopoulos et Delphine Seyrig du Centre audio-visuel Simone de Beauvoir ;

Arlette Zilberg, présidente de la Commission Féminisme des Verts puis EELV (2004-2009); maire-adjointe du 20ème ardt de Paris (2001-2008)

 

Paris, le 2 mars 2015

 

 

[1] Voir son communiqué : https://www.facebook.com/frederique.calandra/posts/10153165530037948

 

La récupération de trop !

On ne peut que s’indigner d’apprendre que des associations militant activement contre la laïcité et contre l’émancipation des femmes prétendent manifester leur solidarité avec les morts de Charlie Hebdo, de l’Hyper-Cacher et des policiers qui les défendaient, en dénonçant « l’islamophobie » et le “climat de guerre sécuritaire ».

Parmi ces associations nombre d’entre elles ont dévoyé la notion de liberté en exigeant sous des prétextes religieux , le «  droit » pour les femmes et même les petites filles de respecter des prescriptions vestimentaires qui stigmatisent leur corps et développent une véritable ségrégation sexuelle en opposition avec la loi commune républicaine.

Choisir la semaine du 8 mars pour organiser un tel meeting, alors que se déroulent dans le monde et en France de multiples manifestations en faveur du droit des femmes est une véritable provocation lorsque l’on sait que c’est au nom des religions, toutes les religions, et des traditions que les droits des femmes sont le plus souvent  bafoués dans le monde.

Premières associations signataires :

 

Atlante vidéos féministes ;

Collectif Féministe « Ruptures »

Du Côté des Femmes ;

EGALE,

Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir ;

Femmes Solidaires ;

Forum Femmes méditerranée ;

LAÏCITÉ LIBERTÉ ;

Le collectif des Femmes sans voile d’Aubervilliers ;

Les efFRONTé-e-s,

Libres Mariannes ;

Ligue du Droit International des Femmes ;

Regards de Femmes ;

Réussir l’Egalité Femmes- Hommes ;

SOS Sexisme.

Un 8 mars laïque et universaliste, partout dans le monde, même dans le 20ème !

La récupération de mouvements sociaux par des forces conservatrices ou obscurantistes est une constante. En matière de féminisme, elle est parfois spectaculaire. Ce qui vient de se produire en mairie du 20eme arrondissement de Paris en est un exemple.

GARDEZ-MOI DE MES AMI-ES, MES ENNEMI-ES JE M’EN CHARGE

La maire, Frédérique Calandra, avait confié à son adjointe en charge de l’égalité Femmes/Hommes la programmation d’événements autour du 8 mars, Journée Internationale des Femmes.

Bien mal lui en a pris !

Cette élue EELV n’a pas hésité à flirter avec des idéologies éloignées de l’émancipation des femmes dont le relativisme culturel et le « féminisme dit- pro-sexe ».

Oubliant qu’elle représentait la mairie, l’élue EELV a choisi de transformer la semaine du 8 mars en semaine de promotion exclusive de thèses et personnalités particulièrement polémiques, pour la plupart engagées depuis longtemps aux côtés des Indigènes de la République (PIR), du site Les mots sont importants et dans la lutte contre la loi 2004 sur le port des signes religieux à l’école :

– Christine Delphy et Sylvie Tissot, sociologues, sont toutes deux initiatrices du premier Manifeste (2005) des Indigènes de la République ; elles sont en outre signataires du manifeste de soutien aux Y’a bon Awards décernés (pour « racisme ») à Caroline Fourest en 2012.

– Rokhaya Diallo est animatrice des Indivisibles, groupe à l’origine de ce prix.

– Ndella Paye est porte-parole d’un collectif de mères voilées militant pour l’abrogation de la circulaire Chatel.

BONJOUR LE 8 MARS !

Quelques semaines après les assassinats des journalistes de Charlie Hebdo, on peut s’étonner qu’une élue choisisse d’offrir un plateau totalement monochrome à des personnes qui ont signé un texte « contre le soutien à Charlie Hebdo » après le premier attentat de 2011.

Partout dans le monde, la Journée Internationale pour le Droit des Femmes est un moment privilégié où les féministes échangent sur leurs revendications, pratiques et stratégies d’émancipation. Militantes, chercheuses, politiques impliqué-es contre les violences sexistes et pour l’égalité entre les sexes, sont invité-es à faire le point et lancer de nouveaux programmes pour battre en brèche la domination masculine et le patriarcat.

C’est l’occasion d’une solidarité internationale avec les femmes qui se battent contre l’oppression des religions d’état ou des groupes fondamentalistes.

Aussi, détourner le 8 mars pour promouvoir des personnalités controversées parce qu’elles ne trouvent rien à redire ni aux pressions de l’arbitraire religieux imposées aux femmes, ni aux violences du système prostitutionnel, est pour le moins manipulatoire.

MÊME PAS PEUR !

Nous saluons l’annulation de cette programmation, acte lucide et courageux de la Maire du 20e arrondissement de Paris.

Nous connaissons la propension de certains groupes à confisquer la parole des féministes et des partisanes de la laïcité; et leur aptitude à se victimiser à la moindre occasion.

Nous savons la violence avec laquelle Caroline Fourest fut interdite de parole lors d’un débat sur le danger du Front National à la fête de l’Humanité.

Nous avons déjà supporté insultes et intimidations proférées par les ami-es de Rokhaya Diallo, issu-es d’un pseudo « syndicat de travailleurs du sexe » pro-système prostitutionnel.

Face à cette nouvelle tentative de récupération et de dévoiement de la Journée Internationale de lutte pour les droits des femmes, nous, féministes universalistes, laïques, engagées pour l’égalité femmes/hommes, contre le racisme et l’antisémitisme, nous apportons tout notre soutien à Frédérique Calandra, maire du 20eme arrondissement de Paris.

La mise au point de la Maire du 20ème Frédérique Calandra :

https://www.facebook.com/frederique.calandra/posts/10153165530037948?fref=nf&pnref=story#

Arlette Zilberg, Christine Le Doaré

Les premières signataires, issues du Mouvement des Femmes :

Annie Sugier, Djemila Benhabib, Michèle Loup, Françoise Morvan, Monique Dental, Nadia Benmissi, Bernice Dubois, Marie-Joseph Bonnet, Jacqueline Feldman, Martine Cerf, Marieme Helie Lucas, Laure Caille, Isabelle Steyer, Nadine Bouteilly, Ana Pak, Agnès Setton, Josiane Doan, Anaïs Decans, Irène Corradin, Mair Verthuy, Sporenda…

 

 

 

Notre droit au Blasphème est sacré. Prochoix n°64 janvier 2015

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ProChoix n°64

JANVIER 2015 (hiver)

Blasphème

Charlie et les Charlots (C. Fourest)

Les pères du blasphème (Fiammetta Venner)

Le monde du blasphème (Tania Vlitko)

Dessine-moi Mahomet. La véritable histoire

de ces caricatures (C. Fourest, F. Venner)

Mahomet au beau visage (Nedim Gürsel)

Transformer le blasphème en racisme (C. Fourest, F. Venner)

L’islamisme ne sort pas de la cuisse de ma mère (Djemila Benhabib)

Le coup de poing du pape (Anne Hermanus)

Le blasphème, c’est sacré (Sophia Aram)

Les premiers nous tuent Les seconds pissent sur nos tombes (Ahmed Meguinil)

L’éthique de la soumission (Samuel Jequier)

Ceux qui ne sont pas Charlie des promoteurs

d’essentialisation et de séparation (Manuel Boucher)

Les ‘je ne suis pas Charlie’ savent-ils qui ils sont ? (Mohamed Sifaoui)

Restons Charlie (CLR, EGALE, UFAL)

Enquêtes et décryptages

Le rapport Obin (Jean-Pierre Obin)

Tintin entre les lignes verbaliser l’imaginaire (Sara Grandt)

Russie et extrêmes droites européennes (Quentin Guillemain)

La théorie du complot se laver les mains en utilisant ses pieds (Kamel Daoud)

On a lu. On a vu. On en parle

Blasphémateur ! – Les fatwas de Charb – Et si on aimait la France -Dans la peau d’une Djihadiste – Iran: un grand quotidien réformateur suspendu – Stop au châtiment de Raïf Badawi – Farid Abdelkrim repenti? – Restructuration des maternités- Hausse des actes antisémites- Maroc : protection des opposants à l’intégrisme- Lettre de Dalil Boubakeur – Réponse de Sami Aldeeb à Dalil Boubakeur

 

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Ian Brossat annonce le relogement de tous les Chibanis de l’Hôtel Voltaire

Suite à l’évacuation du 73 rue du Faubourg Saint-Antoine, en raison de la dangerosité du bâtiment, Ian Brossat, adjoint à la Maire, annonce que Paris va procéder au relogement de la trentaine de Chibanis qui y résidait.

La Préfecture de Police a décidé jeudi matin de faire évacuer l’Hôtel Voltaire, situé au 73 rue du Faubourg Saint-Antoine, pour des raisons liées à la dangerosité du bâtiment. Une trentaine de Chibanis, des retraités algériens et marocains, y résidait depuis plusieurs années.

Comme elle s’y était engagée de longue date, la Ville de Paris a immédiatement entamé un processus de relogement. « Ces hommes ont contribué aux richesses de notre ville et de notre pays. Il est essentiel de leur proposer dans les plus brefs délais des solutions respectueuses de leur dignité », souligne Ian Brossat, adjoint à la Maire de Paris en charge du logement et de l’hébergement d’urgence.

Dès ce soir, les Chibanis seront accueillis au Centre d’hébergement de la rue du Loiret, géré par l’association Aurore. Chacun y disposera d’une studette munie de sanitaires individuels.

« D’ici au 30 juin, chacun – sans exception – se verra attribuer un logement dans Paris », annonce l’adjoint à la Maire. Grâce à la mobilisation de Paris et de l’Etat, vingt d’entre eux sont d’ores et déjà positionnés sur un logement. ‎Le premier emménagera aujourd’hui, dans le 19e arrondissement.

« Nous explorons par ailleurs toutes les voies afin que le bâtiment du 73 rue du Faubourg Saint-Antoine soit transformé en logements sociaux », souligne Ian Bross

(Communiqué de presse)

 

Caroline Fourest avait rappelé la situation des Chinais dans un épisode des Cahiers de Doléances.

 

 

Le Blasphème en danger ? Bande Annonce Cahiers de Doléances #7 réalisé par Caroline Fourest

Le blasphème en danger ? Près de 4 millions de personnes ont défilé le 11 janvier dans toute la France pour défendre la liberté d’expression. Après l’émotion vient le temps des questions. Dans ce septième numéro de « Cahier de doléances », Caroline Fourest s’intéresse à ce droit fondamental cher aux dessinateurs de Charlie Hebdo mais que certains voudraient limiter ou confondent avec l’incitation à la haine. https://carolinefourest.wordpress.com

 

Handicap: dix ans après la loi, l’emploi ne décolle pas

L’intégration des personnes handicapées dans le monde du travail a progressé, mais pas autant qu’espéré.

La loi du 11 février 2005 avait été saluée de toutes parts comme étant une avancée majeure et un texte fondamental en faveur de la citoyenneté des personnes handicapées. « Cela fait partie des grandes lois de la société française, confirme Eric Blanchet, directeur général de l’Adapt (association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées). Mais ce sont des lois qui prennent énormément de temps« .

De fait, dix ans plus tard, si des progrès sont indéniables, les effets sont loin des espoirs suscités par l’adoption du texte. En matière d’emploi, le handicap est enfin devenu un vrai sujet au sein des entreprises. Mais le chômage des personnes handicapées demeure largement supérieur à celui de la population générale et les axes de progression sont nombreux.

Plus de personnes handicapées en emploi…

La loi de 2005 a durci les sanctions financières imposées depuis 1987 aux entreprises de plus de 20 salariés n’employant pas au minimum 6% de travailleurs handicapés. Résultat, le nombre de personnes handicapées travaillant dans ces structures a doublé entre 2006 et 2012, passant à 361.700, comme le souligne le site faire-face.fr, édité par l’Association des paralysés de France (APF). Et seules 8% des entreprises soumises au quota n’emploient aucun salarié handicapé, que ce soit directement ou indirectement (via la sous-traitance).

Le taux d’emploi reste toutefois loin de l’objectif, à 3,1% en 2012. Jusqu’alors exemptée, la fonction publique est soumise depuis 2005 à ce même quota. Meilleure élève que le privé, elle compte 4,9% de personnes handicapées. Ces chiffres ne traduisent toutefois pas nécessairement une hausse des embauches. Nombre de personnes qui étaient déjà handicapées mais n’en avaient pas fait la déclaration officielle ont, grâce à la communication qui a entouré cette loi, demandé et obtenu une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).

… mais aussi davantage au chômage

Fin 2014, près de 430.000 travailleurs handicapés étaient en recherche d’emploi, un chiffre qui a plus que doublé depuis 2007. Le taux de chômage des personnes handicapées atteint les 22%, plus de deux fois celui de la population active. Et un chômeur handicapé sur deux l’est depuis plus d’un an. « Avec les 10 ans de la loi de 2005, on va peut-être fêter les 500.000 demandeurs d’emploi en situation de handicap« , s’inquiète Véronique Bustreel, conseillère nationale emploi formation à l’APF.

« Avec la loi de 1987, il y avait un intérêt pour le sujet, mais limité. Avec celle de 2005, c’est devenu un enjeu de management et d’organisation« , se félicite Véronique Bustreel. Des missions handicap ont été créées dans les grandes sociétés et des managers de différents services, tels les RH ou les achats, se sont saisi de la question. Une dynamique qui permet de sensibiliser davantage les salariés et de mieux aménager les postes de ceux qui en ont besoin.

 

Pour lire la suite http://www.youphil.com/fr/article/07863-handicap-dix-ans-apres-la-loi-emploi-ne-decolle-pas?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=yp-essentiel&utm_content=Volontariat,%20philanthropie,%20déforestation…%20L'actu_qu='il_ne_fallait_pas_rater=&ypcli=ano

Assia Djebar, mort d’une grande voix de l’émancipation des femmes

La romancière algérienne Assia Djebar, «auteur d’écriture française», comme elle se définissait, est morte hier à Paris. Elle avait 78 ans. Née à Cherchell, fille d’instituteur, elle aura été la première étudiante algérienne à intégrer l’Ecole normale supérieure, à Sèvres, après un an de khâgne au lycée Fénelon à Paris. C’était en 1955. Cinquante ans plus tard, élue à l’Académie française, elle était, là encore, une pionnière : la Coupole accueillait pour la première fois un auteur algérien.

Les œuvres de celle qui a dit « j’écris avec un sentiment d’urgence contre la régression et la misogynie » ont été traduites dans 23 langues.


elwatan.com, 07.02.15

L’écrivaine et historienne, membre de l’Académie française  est décédée vendredi soir dans un hôpital parisien des suites d’une longue maladie, a appris  El Watan de source familiale.

La famille est en contact avec l’ambassade d’Algérie en France et le Ministère de la Culture pour le rapatriement du corps de la défunte en Algérie conformément à ses vœux, a indiqué à El Watan, sa fille Jalila. Elle sera enterrée au cimetière de Cherchell aux côtés de son père et de son frère Mohamed, décédé nourrisson.

« Elle retournera aux siens comme elle le voulait » nous a affirmé Jalila, « elle y reposera définitivement dans son pays natal auprès de ses proches ».

Assia Djebar, née Fatma-Zohra Imalayène à Cherchell le 30 juin 1936, auteure majeure au Maghreb est une écrivaine de notoriété mondiale. Elle est l’auteure de romans, poésies et essais traduits dans 23 langues.  Elle a également  écrit pour le théâtre, et a réalisé plusieurs films. Assia Djebar est considérée comme l’une des auteurs les plus célèbres et influentes du Maghreb. Elle est élue à l’Académie française le 16 juin 2005.

Fatma-Zohra Imalayène est la première algérienne et la première femme musulmane à intégrer l’École normale supérieure de jeunes filles de Sèvres en 1955, où elle choisit l’étude de l’Histoire en 1956. À partir de 1956, elle suit le mot d’ordre de grève de l’UGEMA, l’Union générale des Étudiants musulmans algériens, et ne passe pas ses examens. C’est à cette occasion qu’elle écrira son premier roman, La Soif. Elle adopte depuis le nom de plume, Assia Djebar.

Pendant une dizaine d’années (les années soixante dix), elle délaisse l’écriture pour le cinéma. Elle réalise deux films, La Noubades Femmes du Mont Chenoua en 1978, long-métrage qui lui vaudra le Prix de la Critique internationale à la Biennale de Venise de 1979 et un court-métrage La Zerdaou les chants de l’oubli en 1982.

En 1999 elle soutient sa thèse à l’université Paul-Valéry Montpellier 3, une thèse sur sa propre oeuvre : Le roman maghrébin francophone, entre les langues et les cultures : quarante ans d’un parcours : Assia Djebar, 1957-1997 . La même année, elle est élue membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique.

Depuis 2001, elle enseigne au département d’études françaises de l’université de New York. Le 16 juin 2005, elle est élue au fauteuil 5 de l’Académie française, succédant à Georges Vedel, et y est reçue le 22 juin 2006. Elle est docteur honoris causa des universités de Vienne (Autriche), de Concordia (Montréal), d’Osnabrück (Allemagne).

L œuvre de Assia Djebar a pour thèmes l’émancipation des femmes, l’histoire, l’Algérie considérée à travers sa violence et ses langues.

A la demande de Françoise Giroud qui dirige l’Express elle retourne en Algérie le 1er juillet 1962, après huit années d’absence pour réaliser une enquête sur les Algériennes à peine sorties de cent-trente-deux ans de colonisation et de sept années de guerre. L’ enquête sera publiée le 26 juillet 1962 sous le titre L’Algérie des femmes. Assia Djebar conclut son enquête avec les phrases suivantes : « Je les ai vues, la plupart, les premiers jours de l’indépendance. Elles rendaient grâce à Dieu de ces jours arrivés ; et maintenant, elles attendent. »

Elle dira quelques années plus tard : « J’écris, comme tant d’autres femmes écrivains algériennes avec un sentiment d’urgence, contre la régression et la misogynie. »

« Son franc parler bouscule les conventions établies, car elle ne se limite pas à la place habituellement assignée à un écrivain femme et de surcroît à un écrivain femme représentant à elle seule les cultures berbère, arabe, musulmane et française », relève Amel Chaouati, présidente du Cercle es Amis de Assia Djebar fondé en 2009 à l’initiative du livre collectif Lire Assia Djebaraux éditions La Cheminade . (El Watan du 30/07/06, sous le titre: Assia Djebar à l’Académie française: l’écriture , une démarche mystique).

« Assia Djebar démontre … combien elle reste fidèle à ses engagements, à ses idées et à ses principes sans concession aucune », souligne aussi Amel Chaouati.

Ses convictions, son engagement, Assia Djebar les réaffirmera dans son discours du 22 juin 2006 – dont nous reprenons quelques extraits ci-dessous – devant l’Académie française à laquelle elle avait été élue le 16 juin 2005. Elle  sera une des huit femmes membres de cette illustre institution occupant le siège no 5.

Extraits du  discours  qu’Assia Djebar prononça le jeudi 22 juin 2006 devant l’Académie française avant de prendre le siège laissé vacant par le décès de Georges Vedel auquel elle venait d’être élue.

« L’Afrique du Nord, du temps de l’Empire français, — comme le reste de l’Afrique de la part de ses coloniaux anglais, portugais ou belges — a subi, un siècle et demi durant, dépossession de ses richesses naturelles, déstructuration de ses assises sociales, et, pour l’Algérie, exclusion dans l’enseignement de ses deux langues identitaires, le berbère séculaire, et la langue arabe dont la qualité poétique ne pouvait alors, pour moi, être perçue que dans les versets coraniques qui me restent chers.

Mesdames et Messieurs, le colonialisme vécu au jour le jour par nos ancêtres, sur quatre générations au moins, a été une immense plaie ! Une plaie dont certains ont rouvert récemment la mémoire, trop légèrement et par dérisoire calcul électoraliste. En 1950 déjà, dans son « Discours sur le Colonialisme » le grand poète Aimé Césaire avait montré, avec le souffle puissant de sa parole, comment les guerres coloniales en Afrique et en Asie ont, en fait, « décivilisé » et « ensauvagé », dit-il, l’Europe ».

… « Je voudrais ajouter, en songeant aux si nombreuses Algériennes qui se battent aujourd’hui pour leurs droits de citoyennes, ma reconnaissance pour Germaine Tillon, devancière de nous toutes, par ses travaux dans les Aurès, déjà dans les années trente, par son action de dialogue en pleine bataille d’Alger en 1957, également pour son livre Le harem et les Cousins qui, dès les années soixante, nous devint « livre-phare », œuvre de lucidité plus que de polémique ».

« La langue française, la vôtre, Mesdames et Messieurs, devenue la mienne, tout au moins en écriture, le français donc est lieu de creusement de mon travail, espace de ma méditation ou de ma rêverie, cible de mon utopie peut-être, je dirai même ; tempo de ma respiration, au jour le jour : ce que je voudrais esquisser, en cet instant où je demeure silhouette dressée sur votre seuil.

Je me souviens, l’an dernier, en Juin 2005, le jour où vous m’avez élue à votre Académie, aux journalistes qui quêtaient ma réaction, j’avais répondu que « J’étais contente pour la francophonie du Maghreb ». La sobriété s’imposait, car m’avait saisie la sensation presque physique que vos portes ne s’ouvraient pas pour moi seule, ni pour mes seuls livres, mais pour les ombres encore vives de mes confrères — écrivains, journalistes, intellectuels, femmes et hommes d’Algérie qui, dans la décennie quatre-vingt-dix ont payé de leur vie le fait d’écrire, d’exposer leurs idées ou tout simplement d’enseigner… en langue française.

Depuis, grâce à Dieu, mon pays cautérise peu à peu ses blessures.

Il serait utile peut être de rappeler que, dans mon enfance en Algérie coloniale (on me disait alors « française musulmane ») alors que l’on nous enseignait « nos ancêtres les Gaulois », à cette époque justement des Gaulois, l’Afrique du Nord, (on l’appelait aussi la Numidie), ma terre ancestrale avait déjà une littérature écrite de haute qualité, de langue latine…

J’évoquerai trois grands noms : Apulée, né en 125 ap. J.C. à Madaure, dans l’est algérien, étudiant à Carthage puis à Athènes, écrivant en latin, conférencier brillant en grec, auteur d’une œuvre littéraire abondante, dont le chef d’œuvre L’Âne d’or ou les Métamorphoses, est un roman picaresque dont la verve, la liberté et le rire iconoclaste conserve une modernité étonnante…. Quelle révolution, ce serait, de le traduire en arabe populaire ou littéraire, qu’importe, certainement comme vaccin salutaire à inoculer contre les intégrismes de tous bords d’ aujourd’hui.

Quant à Tertullien, né païen à Carthage en 155 ap. J.C, qui se convertit ensuite au christianisme, il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages, dont son Apologétique, toute de rigueur puritaine Il suffit de citer deux ou trois de ses phrases qui, surgies de ce Il e siècle chrétien et latin, sembleraient soudain parole de quelque tribun misogyne et intolérant d’Afrique. Par exemple, extraite de son opus Du voile des vierges , cette affirmation : « Toute vierge qui se montre, écrit Tertullien, subit une sorte de prostitution ! », et plus loin, « Depuis que vous avez découvert la tête de cette fille, elle n’est plus vierge tout entière à ses propres yeux ».

Oui, traduisons le vite en langue arabe, pour nous prouver à nous-même, au moins, que l’obsession misogyne qui choisit toujours le corps féminin comme enjeu n’est pas spécialité seulement « islamiste ! »

En plein iv e siècle, de nouveau dans l’Est algérien, naît le plus grand Africain de cette Antiquité, sans doute, de toute notre littérature : Augustin, né de parents berbères latinisés… Inutile de détailler le trajet si connu de ce Père de l’Église : l’influence de sa mère Monique qui le suit de Carthage jusqu’à Milan, ses succès intellectuels et mondains, puis la scène du jardin qui entraîne sa conversion, son retour à la maison paternelle de Thagaste, ses débuts d’évêque à Hippone, enfin son long combat d’au moins deux décennies, contre les Donatistes, ces Berbères christianisés, mais âprement raidis dans leur dissidence.

Après vingt ans de luttes contre ces derniers, eux qui seraient les « intégristes chrétiens » de son temps, étant plus en contact certes avec leurs ouailles parlant berbère, Augustin croit les vaincre : Justement, il s’imagine triompher d’eux en 418, à Césarée de Maurétanie (la ville de ma famille et d’une partie de mon enfance). Il se trompe. Treize ans plus tard, il meurt, en 431 dans Hippone, assiégée par les Vandales arrivés d’Espagne et qui, sur ces rivages, viennent, en une seule année, de presque tout détruire.

Ainsi, ces grands auteurs font partie de notre patrimoine. Ils devraient être étudiés dans les lycées du Maghreb : en langue originale, ou en traduction française et arabe.

Rappelons que, pendant des siècles, la langue arabe a accompagné la circulation du latin et du grec, en Occident ; jusqu’à la fin du Moyen Âge.

Après 711 et jusqu’à la chute de Grenade en 1492, l’arabe des Andalous produisit des chefs d’œuvre dont les auteurs, Ibn Battouta le voyageur, né à Tanger ; Ibn Rochd le philosophe commentant Aristote pour réfuter El Ghazzali, enfin le plus grand mystique de l’occident musulman, Ibn Arabi, voyageant de Bougie à Tunis et de là, retournant à Cordoue puis à Fez-La langue arabe était alors véhicule également du savoir scientifique (médecine, astronomie, mathématiques etc.) Ainsi, c’est de nouveau, dans la langue de l’Autre (les Bédouins d’Arabie islamisant les Berbères pour conquérir avec eux l’Espagne) que mes ancêtres africains vont écrire, inventer. Le dernier d’entre eux, figure de modernité marquant la rupture, Ibn Khaldoun, né à Tunis, écrit son Histoire des Berbères en Algérie ; au milieu du xiv e siècle. Il finira sa vie en 1406 en Orient ; comme presque deux siècles auparavant, Ibn Arabi.

Pour ces deux génies, le mystique andalou, et le sceptique inventeur de la sociologie, la langue d’écriture semble les mouvoir, eux, en citoyens du monde qui. préférèrent s’exiler de leur terre, plutôt que de leur écriture ».

….Mon français s’est ainsi illuminé depuis vingt ans déjà, de la nuit des femmes du Mont Chenoua. Il me semble que celles-ci dansent encore pour moi dans des grottes secrètes, tandis que la Méditerranée étincelle à leurs pieds. Elles me saluent, me protègent. J’emporte outre Atlantique leurs sourires, images de « shefa’ », c’est-à-dire de guérison. Car mon français, doublé par le velours, mais aussi les épines des langues autrefois occultées, cicatrisera peut-être mes blessures mémorielles.

Mesdames et Messieurs, c’est mon vœu final de « shefa’ » pour nous tous, ouvrons grand ce « Kitab el Shefa’ » ou Livre de la guérison (de l’âme) d’Avicenne/Ibn Sina, ce musulman d’Ispahan dont la précocité et la variété prodigieuse du savoir, quatre siècles avant Pic de la Mirandole, étonna lettrés et savants qui suivirent… »

En 1832, dans Alger récemment conquise, Delacroix s’introduit quelques heures dans un harem. Il en rapporte un chef-d’oeuvre, Femmes d’Alger dans leur appartement, qui demeure un « regard volé ». Un siècle et demi plus tard, vingt ans après la guerre d’indépendance dans laquelle les Algériennes jouèrent un rôle que nul ne peut leur contester, comment vivent-elles au quotidien, quelle marge de liberté ont-elles pu conquérir ?
Dans ce recueil de nouvelles publié pour la première fois en 1980 et ici augmenté d’une longue nouvelle inédite, La nuit du récit de Fatima, Assia Djebar raconte : le vécu, la difficulté d’être, la révolte et la soumission, la rigueur de la Loi qui survit à tous les bouleversements et l’éternelle condition des femmes.
« Langage de l’ombre », souvent prémonitoire en regard de l’histoire immédiate, Femmes d’Alger dans leur appartement est devenu un classique dans de nombreux pays où il a reçu un accueil exceptionnel.

La Femme sans sépulture, c’est Zoulikha, héroïne oubliée de la guerre d’Algérie, montée au maquis au printemps 1957 et portée disparuedeux ans plus tard, après son arrestation par l’armée française. Femme exceptionnelle, si vivante dans sa réalité de mère, d’amante, d’amie, d’opposante politique, dans son engagement absolu et douloureux, dans sa démarche de liberté qui scelle sa vie depuis l’enfance et qui ne l’a jamais quittée, sa présence irradiante flotte à jamais au-dessus de Césarée… Autour de Zoulikha s’animent d’autres figures de l’ombre, paysannes autant que citadines, vivant au quotidien l’engagement, la peur, la tragédie parfois. Véritable chant d’amour contre l’oubli et la haine, de ce passé ressuscité naît une émotion intense, pour ce destin de femme qui garde son énigme, et pour la beauté d’une langue qui excelle à rendre son ombre et sa lumière.

Source: https://sanscompromisfeministeprogressiste.wordpress.com/2015/02/07/assia-djebar-mort-dune-grande-voix-de-lemancipation-des-femmes/