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La charge complotiste des conservateurs catholiques sur le Covid-19

Lancée par Monseigneur Carlo Maria Vigano et publiée par Valeurs Actuelles le 7 mai 2020, une tribune appelle ouvertement dans un registre complotiste les catholiques à la défiance vis-à-vis des autorités étatiques, scientifiques et des médias.

Alors que les signataires sont connus pour leurs très fort engagement pro-vie (essentiellement anti-IVG et anti-euthanasie), on peut lire que « les doutes croissent quant à l’effective contagiosité, à la dangerosité et à la résistance du virus ». Pour rappel, le Covid-19 a provoqué à ce jour plus de 275,000 morts dans le monde et les recherches se poursuivent sur la dangerosité des séquelles après guérison. Les conséquences en pertes humaines sont tout bonnement ignorées. Les signataires raisonnent de la manière la plus complotiste qui soit : ils ignorent les faits pour se demander à qui profite le crime, celui-ci étant si possible un ennemi invisible et mondialisé. C’est ainsi que les limitations de déplacements induites par le confinement sont décrites comme « un prélude inquiétant à la création d’un gouvernement mondial hors de tout contrôle ». Le confinement, certes éprouvant mais temporaire, serait : « une partie inacceptable du projet de ceux qui favorisent l’isolement des individus afin de mieux les manipuler et les contrôler ».

Le ton conspirationniste se poursuit dans une diatribe anti-vaccins, qui seraient moins fiables que d’autres mystérieux remèdes non cités mais « efficaces et peu coûteux », mais privilégiés afin de garantir « aux sociétés pharmaceutiques des bénéfices bien plus importants, qui pèsent sur la santé publique ». Sans autre précision et afin d’attiser la défiance, le chapitre se conclut sur cette prescription religieuse déconnectée : « Nous rappelons également, en tant que pasteurs, que pour les catholiques, il est moralement inacceptable de recevoir des vaccins dans lesquels du matériau provenant de fœtus avortés est utilisé ».

A la lecture de cet appel, l’on se demande s’il l’on n’est pas face à un commentaire d’une groupie d’Alain Soral sur le site Egalité & Réconciliation tant le vocabulaire utilisé est similaire. Les responsables politiques sont des « techniciens » qui chercheraient à fuir leurs responsabilités pénales. Les « médias » sont également pris à partie et accusés de pénaliser « la dissidence » en recourant à des formes de « censure », au risque de « voir imposées des formes subtiles de dictature, vraisemblablement pires que celles que notre société a vu naître et mourir dans un passé récent ».

La tribune se conclut par une demande de passe-droit, afin que les offices et messes puissent reprendre en dehors des règles communes et temporaires de non-regroupement. Pour quelles raisons ? «  Cette autonomie et cette liberté sont un droit inhérent que le Seigneur Jésus-Christ lui a donné pour la poursuite de ses propres fins » mais encore : « Les droits de Dieu et des fidèles sont la loi suprême de l’Église à laquelle elle ne veut ni ne peut déroger ». Autrement dit, la loi de Dieu prévaudrait sur la politique publique de l’Etat. L’intégrisme religieux de la tribune est assumé, notamment dans sa conclusion : « Nous sommes tous appelés à évaluer les faits actuels conformément à l’enseignement de l’Évangile. Cela implique de choisir son camp : avec le Christ, ou contre le Christ. Ne permettons pas que des siècles de civilisation chrétienne soient anéantis sous le prétexte d’un virus, en laissant s’établir une tyrannie technologique haineuse dans laquelle des personnes anonymes et sans visage peuvent décider du sort du monde en nous confinant dans une réalité virtuelle. Si tel est le plan auquel les puissants de la terre entendent nous plier, sachez que Jésus-Christ, Roi et Seigneur de l’Histoire, a promis que « les portes des Enfers ne prévaudront pas » (Mt 16, 18) ».

Parmi les signataires nous retouvons :

  • Mgr. Carlo Maria Vigano, archevêque. Il s’est fait connaître en 2018 en accusant ouvertement le Pape François d’avoir couvert des actes d’abus sexuels qui auraient été commis par le Cardinal McCarrick et en demandant en conséquence au Pape François de démissionner. Mgr Vigano est un proche de Benoit XVI qui l’avait promu secrétaire du gouvernement du Vatican. Après avoir été éloigné aux USA, il a finalement été démis de ses fonctions de nonce apostolique aux USA par le Pape François en 2016 après avoir organisé une rencontre « surprise » entre ce dernier et la greffière Kim Davis, l’égérie américaine des anti mariages pour tous. Depuis, Mgr Vigano poursuit son rapprochement avec le camp traditionaliste et ultra-conservateur du Vatican. Dans sa lettre ouverte de 2018 demandant la démission de François, il décrivait déjà de façon complotiste et homophobe un « réseau homosexuel » avec le « pouvoir tentaculaire d’une pieuvre » au Vatican, qui serait responsable d’un renversement du dogme catholique et des scandales de pédophilie dans l’Eglise. Il est également proche du Cardinal Burke, soutien de Donald Trump et opposant au Pape François, qui lui a apporté son soutien suite à cette lettre ouverte.

  • Cdl Gerhard Müller, ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, renvoyé en 2017 par le Pape François. En 2019, il publie un Manifeste pour la Foi qui sera salué par la presse traditionnaliste et notamment LifeSiteNews comme une « quasi-correction du pontificat du Pape François ». il y affirme que « Garder le silence sur les vérités de la foi catholique ou enseigner le contraire est une forme de tromperie religieuse qui provient de l’Antéchrist ». Il avait reçu en 2014 la Fraternité Saint Pie X afin d’œuvrer pour un rapprochement avec Rome.

  • Cdl Joseph Zen Ze-kiun, évêque émérite de Hong Kong. Il est en conflit avec le Pape François depuis 2019, date à laquelle le Vatican a passé un accord avec le gouvernement chinois qui placerait l’Eglise sous les ordres du Parti Communiste.

  • Cdl Janis Pujats, évêque émérite de Riga. Il est proche des milieux traditionalistes et milite pour une approche conservatrice du dogme. C’est un opposant à la communion pour les divorcés remariés.

  • John-Henry Westen, rédacteur en chef de LifeSiteNews.com, un site web fondé par le lobby canadien Campaign Life Coalition pour s’opposer aux lois pro-IVG. Le site web publie également du contenu anti-euthanasie et anti-mariage pour tous. C’est sur ce site web qu’a été publiée en 2018 la tribune de Mgr Vigano appelant le Pape François à démissionner, ou encore en 2019 la tribune du prêtre Aidan Nichols critiquant les positions trop « accomodantes » du Pape envers l’avortement, les homosexuels, les protestants ou encore les musulmans.

  • Maître André Bonnet, avocat, fondateur de l’association Promouvoir qui se donne pour objectif de lutter pour « les valeurs judéo-chrétiennes dans tous les domaines de la société (…) et faire obstacle à l’inceste, au viol, à l’homosexualité ». Promouvoir obtient en 2000 l’interdiction du visa d’exploitation du film Baise Moi de Virginie Despentes, puis en 2015 l’interdiction de Love, le film de Gaspar Noé, aux moins de 18 ans.  Une plainte avait été également déposée contre le film La Vie d’Adèle. André Bonnet a été responsable du Mouvement national républicain (MNR, ex-parti de Bruno Mégret) dans le Vaucluse avant de s’investir dans la Manif Pour Tous aux côtés de Frigide Barjot pour dénoncer le mariage pour tous qu’il compare « à la montée du nazisme et du marxisme-léninisme ».

  • Reynald Secher, historien ayant proposé une thèse sur le prétendu « génocide vendéen » pendant la révolution française

  • Michael J. Matt, directeur de The Remnant, un site web proche de la Fraternité Saint Pie X

  • Olivier Figueras, journaliste sur Radio Courtoisie

  • Jean-Pierre Maugendre, délégué général de Renaissance Catholique, association créée en 1988 suite à l’excommunication de Mgr Lefebvre pour soutenir la Fraternité Saint Pie X. Renaissance Catholique participe régulièrement aux « Marches pour la Vie ».

  • L’abbé Guy Pagès, auteur de nombreuse vidéos sur Internet où il dénonce essentiellement l’Islam et l’homosexualité,

  • Steven Mosher, président du Population Research Institute, lobbyiste anti-IVG, notamment auprès du Président George W. Bush. Il a ainsi obtenu la réduction drastique des financements américains auprès du planning familial du fond des Nations Unies. Dans une chronique très partagée sur les réseaux sociaux et publiée sur le tabloïd The New York Post, il affirme sans preuve que le Covid-19 s’est échappé du Laboratoire P4 de Wuhan.

  • Dr Stefano Montanari, directeur scientifique de son laboratoire Nanodiagnostics à Modène. Diplômé en pharmacie, il est un militant anti-vaccins italien : « dans les meilleurs des cas, les vaccins sont parfaitement inutiles. Ils causent généralement des dommages qui ne sont pas rares et irréversibles ». Comme le rappelle le site Conspiracy Watch, concernant le Covid-19, il a déclaré à plusieurs reprises, par exemple sur son site personnel ou sur le site d’extrême droite italien ImolaOggi.it, qu’il s’agissait d’un virus « fabriqué en laboratoire », à rebours de toutes les connaissances scientifiques sur l’origine de ce virus.

  • Mgr Luigi Negri, archevêque émérite de Ferrara-Comacchio

  • Mgr Thomas Peta, archevêque métropolite d’Astana

  • Mgr Athanasius Schneider, évêque auxiliaire d’Astana

  • Mgr Jan Pawel Lenga, archevêque émérite de Karaganda

  • Mgr Rene Henry Gracida, évêque émérite de Corpus Christi

  • Mgr Andreas Laun, évêque auxiliaire de Salzburg

  • Prof. Vittorio Sgarbi, critique d’art, essayiste

  • Aldo Maria Valli, journaliste

  • Magdi Cristiano Allam, écrivain

  • Giulio Meotti, journaliste

  • Marco Tosatti, journaliste

  • Claudio Messora, directeur de Byoblu.com

  • Robert Moynihan, écrivain, journaliste

  • Cesare Sacchetti, journaliste

  • Prof. Giorgio Nicolini, directeur de Tele Maria

  • Vittoria Alliata di Villafranca, journaliste, écrivain

  • Maria Guarini, éditeur

  • Prof. Francesco Lamendola

  • António Carlos de Azeredo, éditeur

  • Riccardo Zenobi, écrivain

  • Danilo Quinto, écrivain

  • Jeanne Smits, journaliste

  • Dr Antonietta Gatti, directeur de recherches, Nanodiagnostics laboratory, Modena

  • Prof. Alessandro Meluzzi, psychiatre

  • Prof. Martino Mora, philosophe

  • Prof. Massimo Viglione, historien et essayiste

  • Prof. Elisabetta Sala, enseignant et écrivain

  • Prof. Amadeu Teixeira Fernandes, Georgetown University

  • Alfonso Martone, CNR Italy.

Covid-19 : l’histoire d’un « doute »

C’est l’histoire d’un doute. 

L’épidémie de Covid-19 fait la Une de nos actualités, que l’on s’informe via des canaux traditionnels tels que la télévision ou la radio, ou sur des plateformes numériques via des sites web, eux aussi plus ou moins bien intentionnés. Le Service européen pour l’action extérieure (EEAS), un organe institutionnel de l’Union Européenne, a recensé sur sa plateforme EUvsDisinfo, pas moins de 110 cas de désinformations provenant de médias russes depuis le 22 janvier 2020. Ce rapport inscrit ces désinformations dans le cadre d’une « stratégie bien établie du Kremlin consistant à utiliser la désinformation pour amplifier les divisions, semer la méfiance et le chaos, et exacerber les situations de crise et les problèmes d’intérêt public ».

Les messages ciblant la population russe décrivent le plus souvent le virus comme une forme d’agression anti-russe, allant parfois jusqu’à affirmer dans des articles visant essentiellement un public international qu’il a été créé en laboratoire par des pays européens ou par les Etats-Unis. Ce « doute » émis quant à l’origine du virus a été repris par Marine Le Pen le 30 mars 2020 au micro de France Info. En effet, la présidente du Rassemblement National a affirmé que le gouvernement ment sur « absolument tout, sans aucune exception » à propos de l’épidémie, et a conclu qu’il était de « de bon sens » de se demander si le virus ne s’était pas « échappé d’un laboratoire », tout en précisant qu’elle-même n’avait pas « d’opinion » sur le sujet. Si elle avait eu la volonté de s’informer, Marine Le Pen aurait pu voir que le génome du virus a été entièrement séquencé dès janvier par l’Institut Pasteur par exemple, et qu’il n’y a pour les experts aucun « doute » que son origine est exclusivement animale, comme le confirment les revues de référence scientifique The Lancet ou Emerging Microbes & Infections. On se demande pourquoi nos chercheurs perdent leur temps à séquencer l’ADN du virus, puisqu’il suffit aux populistes de moins d’une minute d’antenne pour mettre en « doute » leurs travaux.

Le « doute » scientifique n’est donc pas l’équivalent du « doute » complotiste. Le « doute » scientifique est levé dès lors qu’il y a consensus scientifique, puis dans une autre mesure, transparence au niveau de la population. C’est le cas pour l’origine non-humaine du Covid-19. Ce n’est pas le cas concernant l’efficacité de traitement à la chloroquine proposée par le professeur Raoult, ses études n’étant pas pour le moment considérées comme assez solides, car elles manquent notamment de groupes témoins et de nombre de patients suffisant. Le « doute » est logiquement permis, même si tout le monde s’accorderait à être soulagé si la chloroquine s’avérait être un traitement efficace. Néanmoins, ce « doute » raisonnable concernant la chloroquine n’intéresse pas les complotistes, qui préfèrent mettre en « doute » les scientifiques critiquant logiquement la méthodologie non consensuelle du professeur.

Le défaitisme est un puissant carburant des populistes. La réponse sanitaire européenne à cette épidémie est critiquable à de nombreux égards. On peut légitimement reprocher à nos dirigeants des coupes budgétaires dans l’hôpital public, des manques de moyens dans la recherche médicale, ou une mauvaise anticipation des risques biologiques. Et formuler des revendications claires. Ces critiques sont d’ailleurs émises par la grande majorité des partis d’opposition, avec plus ou moins de bonne foi concernant leurs propres responsabilités. Mais pourquoi en parallèle promouvoir la situation en Chine ou en Russie, alors que ces pays n’étaient pas plus préparés que nous à cette crise et camouflent éhontément leur nombre de citoyens infectés et de morts ? Si « doute » il y a dans les bonnes intentions de certains états dans cette crise, ne devrait-on pas s’interroger sur l’envoi par la Chine de millions de masques à bas prix mais défectueux ? Ou sur l’envoi massif par la Russie de 15 vols militaires de soldats en Italie, sous couvert d’action médicale ? Le général italien Marco Bertolini appelle pourtant à rester attentif : « La Méditerranée, aussi bien orientale que centrale est un terrain de lutte pour l’hégémonie, de la Syrie à la Libye. Il faut éviter qu’une crise de type sanitaire devienne une affaire politico-militaire ». Selon le quotidien italien La Stampa, suite à ce déploiement militaire étranger, « les craintes se sont renforcées aussi bien au sein du gouvernement que des milieux militaires italiens » .

Depuis quelques jours, les journalistes »doutent » de leur côté des chiffres officiels chinois. Pekin annonce ne plus avoir de nouveaux cas de Covid-19 sur son territoire, et communique un nombre de 3304 morts (soit presque 3 fois moins qu’en Italie à ce jour). Or les commandes d’urnes funéraires dans la région de Wuhan explosent. On parle de dizaines de milliers d’urnes commandées pour les principales morgues, ce qui, même en retirant le nombre de morts naturelles, permet aux grands quotidiens internationaux de remettre légitimement en cause la propagande chinoise. Mais dans ce cas, « douter » est un luxe. Pour avoir posé des questions sur la minimisation aux répercussions gravissimes du nombre de morts, des dizaines de journalistes chinois ont disparu. Des dizaines de milliers de lignes téléphoniques ont été résiliées. La quasi totalité des journalistes étrangers a été expulsée.

Il est grand temps de se ressaisir. « Douter » de tout, tout le temps, nivelle le « doute » raisonnable et critique d’un citoyen à une forme de complotisme nihiliste. Si la défiance vis-à-vis des personnalités politiques semble s’installer, il faut espérer qu’il reste le sanctuaire scientifique, qui admet lui aussi la notion de « doute », pour nous ramener à la raison. Et la confiance dans nos démocraties, certes imparfaites et donc perfectibles. La stratégie de l’intoxication à la désinformation de masse par la Russie ou la Chine est une arme de soft-power désormais bien documentée. Il est urgent pour nous de faire la différence.

Coronavirus : les apôtres du châtiment divin.

Alors que le Coronavirus est devenu une pandémie mondiale, voici un panorama des réactions qui ne nous aideront pas :

  • Hani Ramadan lors de son sermon au Centre Islamique de Genève le 14 mars 2020 :

    « Observe donc ce qu’a pu faire une minuscule créature pour remettre en cause la prétendue toute puissance de l’Empire du milieu. Il y a effectivement pour le croyant en tout cela des leçons à retirer, notamment s’il revient aux enseignements du Prophète (…). L’une de ses causes est que les hommes se livrent ouvertement à la turpitude comme la fornication et l’adultère ce qui déclenche des maladies et des épidémies nouvelles ».

  • Christine Boutin sur Twitter : 

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Avant de trouver huit jours plus tard une explication :

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  • Oppah Muchinguri, ministre zimbabwéenne de la Défense :

    « Le coronavirus est l’œuvre de Dieu qui punit les pays qui nous ont imposé des sanctions » « Ils sont enfermés chez eux. Leur économie souffre comme ils ont fait souffrir la nôtre, ils doivent sentir les effets du coronavirus pour comprendre notre douleur ».

  • Meir Mazuz, rabbin orthodoxe et ancien chef spirituel du parti ultranationaliste Yahad, lors d’un sermon :(Les gays prides sont des) « parades contre la nature, et quand quelqu’un va contre la nature, Celui qui a créé la nature se venge contre lui ». Mais les pays arabes seraient épargnés par le virus car ils n’organisent pas ces marches et n’ont donc « pas ce penchant diabolique » .
  • Rick Wiles, pasteur évangélique américain et fondateur de TruNews, site conspirationniste crédité par Donald Trump :
    « L’Ange de la Mort doit être actuellement en train d’arriver sur la planète ». Ce dernier aurait commencé à tuer en Chine car il s’agirait d’un « gouvernement communiste sans Dieu qui persécute les chrétiens et force l’avortement », mais il pourrait aussi cibler les Etats-Unis et notamment les personnes LGBT car « Dieu est sur le point de purger de nombreux vices sur cette planète ».
  • Hadi al-Modarresi, leader chiite irakien : 

    « La propagation du Coronavirus est un « acte d’Allah » pour punir les Chinois de leurs exactions contre les Ouïghours ». Avant de lui-même être contaminé…

Comment la presse russe récupère (aussi) la Marche du 8 mars.

RT France et Sputnik sont les deux médias phare du gouvernement de Poutine en France. Financés par le Kremlin, ils proposent une vision « alternative » de l’actualité dans la droite ligne conservatrice de Moscou. De nombreuses fois épinglés pour la publication d’articles ou de vidéos complotistes, ces outils de « soft-power » russes inquiètent jusqu’au Parlement Européen qui a adopté en 2016 une résolution « visant à contrer la propagande dirigée contre elle par des tiers ». La résolution européenne mentionne explicitement RT et Sputnik et les accuse directement « de s’attaquer aux valeurs démocratiques, de diviser l’Europe et de donner l’impression que les États du voisinage oriental de l’Union européenne sont défaillants ».

On peut donc légitimement douter de l’engouement de ces deux médias pour les revendications féministes défendues lors de la marche du 8 mars à Paris.

Mais la crise des Gilets Jaunes qui s’étend depuis 2018 est passée par là. Depuis, RT France et Sputnik sont devenus de fidèles relais des débordements de rue lors de manifestations en France, diffusant abondamment des vidéos choc de vitrines brisées et de manifestants Gilets Jaunes blessés. Deux figures des Gilets Jaunes, Jerôme Rodrigues et Maxime Nicolle (adeptes de théories complotistes), bénéficient d’innombrables interviews et plateaux-TV organisés par ces deux médias pour marteler leurs revendications et commenter l’actualité.

Ainsi, plus encore que les chaînes d’info en continu, RT et Sputnik ont compris l’intérêt de capitaliser sur les images d’affrontements. Leur potentiel est énorme. Il permet à la fois, par son caractère sensationnel, de gagner en audience, mais surtout de présenter la France comme étant au bord du chaos, et de faire passer le modèle russe pour le défenseur des revendications du « peuple ».

Regardons de plus près la page d’accueil de RT France en ce lundi 9 mars 2020.

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Deux articles concernant la marche du 8 mars figurent en très bonne place.

La dégradation imbécile par des féministes d’une plaque commémorative d’élèves juifs déportés, où l’inscription « fraternité » de la devise républicaine a été rayée pour être remplacée par « adelphité », fait les choux gras de RT dans l’onglet « POLEMIQUE ». On a pourtant connu la chaîne du Kremlin moins sensible à la défense des valeurs républicaines et à la lutte contre l’antisémitisme.

Dans l’onglet « CHOC », toujours en page d’accueil, on retrouve un long article comprenant des vidéos d’affrontement entre le collectif Némésis (femmes anti-immigration) et des militants du collectif Antifa Squad (issu du mouvement antifa d’ultra-gauche). Ces derniers ont revendiqué sur leur page Facebook avoir porté « coups, vols de banderoles et slogans » contre le Collectif Némésis pour les empêcher de défiler. Evidemment, la chaîne RT ne présente pas le Collectif Némésis comme un collectif d’extrême-droite aligné sur les positions des identitaires et elle relaie abondamment les propos d’une de leur porte-parole, ravie de pouvoir présenter des femmes anti-immigration comme des victimes de la violence d’extrême-gauche.

Un autre article de RT, non présent sur la copie d’écran ci-dessus, décrit la journée du 8 mars en insistant sur ces affrontements, puis conclut sur une action la Manif pour Tous, qui a voulu profiter de la Journée des Droits des Femmes pour son propre agenda : « A l’occasion de la Journée de la femme, La Manif pour tous a elle aussi mené une action devant l’Assemblée nationale, pour faire entendre son opposition à l’ouverture de la PMA «sans père» et à la GPA ». 

De son côté, Sputnik a profité de la manifestation du 8 mars pour parler presque exclusivement de « violences policières » en France, dans deux articles intitulés « Une charge policière brutale contre la «Marche féministe» à Paris – vidéos » et « Droits des femmes: des manifestantes mobilisées contre les violences sexuelles et policières ».

Il est indéniable que les images de militantes féministes encerclées, puis chargées par les CRS et forcées de descendre dans le métro à la station République sont à la fois révoltantes pour le public et catastrophiques pour le gouvernement. Ces actions se sont produites dans la nuit du 7 au 8 mars 2020, lors de la Marche Nocturne, précédant la grande marche internationale du lendemain.

Vu de l’angle féministe, on est écœurées de voir des femmes être rappelées à l’ordre une veille de journée de revendications. De l’angle des militantes antifas présentes en tête de cortège ce soir là, criant en cœur « tout le monde déteste la police », « police : violeurs, assassins », on a pu hurler son point de vue radical et on s’est donné quelques frissons. De l’angle de la Préfecture de Police de Paris, on a maintenu l’ordre face à des manifestantes qui n’ont pas respecté l’appel à la dispersion prévu à 22h et qui ont « délibérément provoqué les forces de l’ordre et perturbé le déroulé de l’événement ». De l’angle de RT France et de Sputnik, on a juste vu ces images comme du pain béni, qu’on s’est empressé de diffuser sans aucun contexte.

La confusion dans les esprits est telle que des militantes comme une porte-parole des Effrontées ou des collectifs féministes comme NousToutes n’hésitent même plus à s’exprimer sur RT France ou à relayer un de leurs journalistes. Croyant peut-être voir dans leur intérêt pour les affrontements violents du 8 mars des velléités féministes, elles jouent le rôle d’idiot utile, déjà si cher à l’époque de l’URSS.

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Il suffit pourtant de quelques clics pour vérifier l’engagement « féministe » de ces médias. Le mois dernier, Sputnik faisait la promotion de l’islamologue russe Natalia Tambieva dans plusieurs articles, dont un qui a le mérite d’avoir un titre évocateur : « L’homme, un tuteur de la femme? Vision alternative d’une féministe musulmane ». Lorsqu’elle commente des passages du Coran où il est écrit que «Les hommes ont une autorité sur les femmes», «Les femmes vertueuses sont obéissantes à leur mari», «Quant à celles dont vous craignez la désobéissance […] éloignez-vous d’elles dans leurs lits et frappez-les», Natalia Tambieva affirme qu’il s’agit ici « tout de même d’un partenariat » entre les sexes. Quant à RT, on ne compte plus ses articles moquant les initiatives féministes racialistes, comme le discours d’Aïssa Maïga lors de la Cérémonie des Césars « C’était toi le renoi» : aux César, le discours «antiraciste» de l’actrice Aïssa Maïga fait un bide ».

Les abus de pouvoir par la police sont souvent une réalité, qu’il faut continuer de surveiller et de dénoncer pour contre-balancer toute tentation autoritaire, peu importe le gouvernement. Néanmoins, les scènes de dégradations urbaines venant de féministes ne convaincront jamais personne. Le féminisme s’est toujours honoré d’avoir été un mouvement joyeux et progressiste, visant l’émancipation des femmes. Il a gagné de nombreuses batailles, mais le chemin est encore long pour convaincre. S’il est aveuglé par la tentation de l’affrontement direct et de la lutte intersectionnelle et différentialiste, il peut conduire à des partenariats involontaires avec les premiers promoteurs du conservatisme, dont les médias russes sont un exemple concret.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Affaire Mila : quand les pleutres continuèrent d’être lâches.

Le  19 janvier 2020, Mila, une adolescente de 16 ans, publie sur son compte Instagram une réponse vidéo à un jeune homme qui, après avoir été plus qu’insistant avec elle, lui envoie des insultes homophobes telles que « sale lesbienne » en invoquant sa religion.  Mila l’éconduit et lance alors :  » Je déteste la religion […], le Coran, il n’y a que de la haine là-dedans, l’islam, c’est de la merde, c’est ce que je pense. Je ne suis pas raciste, pas du tout. On ne peut pas être raciste envers une religion. […] Votre religion, c’est de la merde, votre Dieu, je lui mets un doigt dans le trou du cul, merci, au revoir ».

Ce qui aurait pu rester une affaire d’homophobie inconnue du grand public prend des proportions inquiétantes au fil des jours. Mila reçoit une pluie d’insultes sur les réseaux sociaux, la plupart au nom du Coran, accompagnées d’un nombre de menaces de mort et de viol qui ne cesse de croître.

Le parquet de Vienne dans l’Isère se saisit de l’affaire et décide évidemment de classer sans suite la procédure contre Mila pour « provocation à la haine à l’égard d’un groupe de personnes », le délit de blasphème n’existant pas dans le droit français. En revanche, l’instruction se poursuit concernant le harcèlement et les menaces homophobes et sexistes dont elle est victime. L’adolescente a du être déscolarisée et reste actuellement dans l’attente d’une solution de la part du rectorat.

Face à cette situation inédite dans un pays pourtant laïc comme la France, plusieurs personnalités et associations se sont illustrées par leur absence d’empathie avec Mila, d’absence d’attachement au droit inaliénable à la liberté d’expression, notamment lorsqu’il s’agit de critiquer la religion, ou de relativisme douteux.

Florilège :

  • Nicole Belloubet, ministre de la Justice, au micro d’Europe 1 : « Dans une démocratie, la menace de mort est inacceptable. cela vient rompre avec le respect que l’on doit à l’autre (…). L’insulte à la religion c’est évidemment une atteinte à la liberté de conscience, c’est grave, mais ça n’a pas à voir avec la menace (de mort, ndlr) ».

Devant le tollé, Nicole Belloubet reconnaîtra ensuite une « maladresse« , l’insulte à la religion n’existant pas en France…

  • Feïza Ben Mohamed, porte-parole de la plateforme L.E.S. Musulmans et chroniqueuse sur France Maghreb, sur Twitter : « Nicole Belloubet a parfaitement raison et vous le savez tous. L’insulte à la religion doit être sanctionnée. Mila ou pas Mila c’est pareil.
  • Ségolène Royal, future candidate en 2022 ?, sur France 3 : «Critiquer une religion, ça n’empêche pas d’avoir du respect. Ça n’empêche pas d’avoir de l’éducation, de la connaissance, d’être intelligent par rapport à ce qu’on dit (…) Une adolescente, qui est peut-être encore en crise d’adolescence, si elle avait dit la même chose sur son enseignant, sur ses parents, sur sa voisine, sur sa copine, qu’est-ce qu’on aurait dit ? On aurait dit simplement: «un peu de respect », ajourant qu’elle n’aurait « absolument pas » partagé le mot clé #JeSuisMila.

Des propos plutôt cohérent pour une personne qui trouvait « inadmissible qu’on insulte l’image sacrée du prophète musulman » lors de la publication des caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo, et qui affirmait qu' »aux yeux des garçons, le string réduit des jeunes filles à leur postérieur (…) après on s’étonne que les adolescentes soient victimes d’attouchements ou de violence sexuelle ». 

  • Jean Michel Apathie, sur le plateau de C l’Hebdo du France 5 : « je ne suis pas Mila, je suis résolument Ségolène, son analyse me paraît plus juste et plus sage que toutes celles que j’ai entendues ».
  • Abdallah Zekri, délégué général du CFCM (Conseil Français du Culte Musulman) au micro de Sud Radio: « Je dis que cette fille, elle sait très bien ce qu’elle fait, a-t-il notamment déclaré. Qui sème le vent récolte la tempête. » Même s’il rappelle qu’il est « contre le fait qu’on menace [Mila] de mort », il persiste : « Cette fille, elle sait ce qu’elle a dit. Elle a pris ses responsabilités. Qu’elle critique les religions, je suis d’accord, mais d’insulter et tout ce qui s’ensuit… Maintenant, elle assume les conséquences de ce qu’elle a dit. », « Est-ce qu’on lui a dit ‘sale française’ ? Ou est-ce qu’elle le dit pour se faire plaindre ? Vous la croyez, cette fille-là ? Moi je ne la crois pas. » Lorsqu’une invitée lui fait remarquer qu’on ne peu pas dire que Mila n’a que « ce qu’elle mérite », il renchérit : « Si, je le dis. Elle l’a cherché, elle assume. Les propos qu’elle a tenus, je ne peux pas les accepter. »

Rappellons qu’après les attentats de Charlie Hebdo, Abdallah Zekri s’était offusqué de la Une de Charlie Hebdo représentant le prophète Mahomet effondré : « ça va mettre de l’huile sur le feu ! ». 

  • Ibrahim Maalouf, trompettiste, sur Twitter : « On est tous d’accord que ces propos honteux ne méritent en aucun cas des menaces de mort. Il faut absolument dénoncer et condamner. Cependant, quand j’entends @ZinebElRhazoui dans @cavousf5: «Mila pour moi c’est un modele pour la jeunesse française, c est une fille qui a tout compris à ce qu’est l’esprit de l’universalisme, l’esprit des lumières.» Je suis scandalisé. C’est de l’incitation à la haine. Encourager l’immoral au prétexte que c’est légal, c’est de la démagogie dangereuse. C’est ce qu’ont fait certains à l’époque de Matzneff ou ce que défendent les exilés fiscaux, pour prendre 2 exemples différents. Pitié, battons nous pour les vraies valeurs ».

Ibrahim Maalouf a été condamné en 2018 à quatre mois de prison avec sursis pour agression sexuelle sur mineure.

  • Marie Kirschen, rédactrice en chef des Inrocks lorsque le site Arrêt sur Images lui demande pourquoi le sujet n’est pas traité aux Inrocks (ni à Mediapart ou encore Télérama) : « Les quelques personnes qui pouvaient écrire sur cette affaire-là étaient déjà occupées à d’autres choses ». Marie Kirschen ajoute : « On s’est vraiment recentrés sur la culture il y a un peu plus d’un an, il y a beaucoup moins de papiers sur des thématiques sociétales ou politiques ».

Un coup d’œil sur le site des Inrocks permet de voir que les sujets politiques et d’actualité sont pourtant bien présents dans l’hebdomadaire (Coronavirus, débats à l’Assemblée Nationale sur la nouvelle loi retraite…).

  • Osez le Féminisme, via sa porte-parole Alyssa Ahrabare interrogée lors de l’émission des Grandes Gueules de RMC : « C’est un sujet sur lequel on a choisi de ne pas se prononcer », » c’est des questions qui sont extrêmement complexes ».
  • Odon Vallet, historien des religions, sur CNews : « En 2005 lorsqu’il y a eu les caricatures dans les journaux danois, j’ai annoncé des attentats, il y a eu des attentats au Pakistan contre les intérêts du Danemark, et j’ai dit, si on fait pareil en France dans dix ans vous avez des morts, et il y a eu Charlie Hebdo. Je vous annonce aujourd’hui (…) que si on continue comme ça on aura prochainement des attentats contre des français en France ou dans des pays d’Afrique ». Jean-Marc Morandini demande alors « si on continue quoi ? Odon Vallet répond: « si on continue à injurier l’Islam ».
  • Edwy Plenel sur France 5 : « je suis liberté, et la liberté c’est la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre (…) et donc de blasphémer mais (…) il y a beaucoup de violence sur internet, et la violence qu’elle a provoquée et qu’elle subit en est un exemple, mais je rappellerais un autre cas, la chanteuse Mennel qui elle, a été lapidée de manière unique au nom cette fois-ci d’attaques qui étaient de stigmatisation de l’Islam la visant elle ».
  • Christophe Frot, animateur sur France Maghreb, au micro de C8 lors de l’émission Balance Ton Post : « le droit au blasphème ça existe (…) par contre quand elle dit je vais mettre un doigt dans le cul de votre Dieu (…) à qui elle s’adresse Mila ? C’est aux musulmans qu’elle s’adresse, ces mêmes musulmans qui se sentent stigmatisés à longueur de journée (…) c’est juste intolérable, je ne suis pas Mila », »Cette demoiselle, elle a eu ces propos, le lendemain elle n’hésite pas à lancer une cagnotte en demandant 15000 euros pour enregistrer un disque, est-ce que c’est pas conscient tout ça ? »(une cagnotte a été lancée par un inconnu pour la soutenir, avant d’être rapidement fermée…), « je condamne les menaces qu’elle reçoit, et je condamne évidemment de toutes mes forces ses propos ».
  • Philippe Marlière, ancien militant au NPA puis au Front de Gauche, professeur à University College de Londres, sur Twitter : « le blasphème est souvent un acte religieux, un acte aussi sectaire et intolérant que la diabolisation de l’athéisme par certains déistes », « le « droit au blasphème » c’est essentiellement revendiquer le droit de tenir des propos racistes et sexistes sans s’exposer à la condamnation de la justice », « en l’absence d’oppression, le blasphème exprime non pas une critique des religions mais la haine des minorités: en France, avant tout un racisme anti-Arabes ».
  • Nabilla, star de télé-réalité puis chroniqueuse sur C8, sur Twitter (plus de 2,7 millions d’abonnés) : emoji vomi, liké plus de 61000  fois, en réponse à l’interview de Mila dans l’émission Quotidien.
  • Raquel Garrido, ex porte-parole de La France Insoumise, chroniqueuse dans l’émission Balance Ton Post sur C8 : « Pourquoi est-ce que le gouvernement et les élites politiques se saisissent de la question religieuse en ce moment, c’est pour qu’on arrête de parler du plus grand mouvement social depuis l’après guerre (…) vous êtes complices, même à votre dépens, d’une grande opération de diversion ».
  • Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, au micro de Jean-Jacques Bourdin sur RMC : « injurier une religion comme elle l’a fait, je me suis mis à la place des musulmans (…), je me serais senti blessé. En même temps, dans notre pays qui est un république laïque le droit de critiquer une religion doit être préservé (…) on doit avoir le droit de critiquer une religion, on droit pouvoir la respecter », « Cette jeune fille, ce qu’elle a dit, ce n’est pas admissible, en même temps, les menaces de mort qu’elle subit, ce n’est pas admissible ».
  • Révolution Permanente, qui se définit comme un site d’information d’extrême-gauche, lié au NPA : « Résumons les faits. L’affaire tourne autour de… l’islam (ça faisait longtemps). Une lycéenne de 16 ans a tenu des propos réactionnaires contre l’islam dans une vidéo live, la qualifiant de « religion de violence ». »Le fait est que Mila, consciemment ou non, du haut de ses 16 ans, véhicule un discours haineux. Évidemment, ça ne légitime en rien le harcèlement, ni les menaces de mort, ni les insultes lesbophobes et misogynes qu’elle a reçu. Ces actes sont intolérables, il n’y a pas de doute la dessus. Mais là n’est pas la question. »
  • Yassine Belattar, humoriste, sur C8 dans l’émission Touche Pas à mon Poste : « Moi je peux concevoir que hier elle a fait des erreurs d’une fille de 16 ans, moi si on me donnait un micro à 16 ans j’aurais dit de la merde. Et moi je comprends pas que cette fille là, aujourd’hui y’a des gens qui commencent à lui donner… Je suis triste pour elle parce qu’à 16 ans, être l’incarnation du FN, du Printemps Républicain, et des gens qui sont toute l’année mal intentionnés concernant une religion par définition. Et surtout pour conclure là dessus, ça commençait à s’éteindre un peu le feu autour de l’Islam, c’est à dire que ça faisait semaines qu’on en parlait pas à cause des mouvements sociaux, on était plus « gilets jaunes », « grève », et en fait grâce à Mila, à cause de, ils ont trouvé un cheval de Troie à tout cela ».
  • Damien Abad, président du groupe LR à l’Assemblée Nationale, sur LCI : « je souhaite la liberté d’expression la plus totale, mais je dis que quand cette liberté d’expression est détournée pour créer de la aine anti-religieuse, alors oui, il y a une barrière à mettre », «  »Il faut sanctionner tous ceux qui ont insultés et menacés de mort Mila mais la manière dont elle s’est exprimée, avec beaucoup de vulgarité, n’est pas acceptable ».
  • Ni Putes Ni Soumises, mouvement féministe, sur Twitter : « Même si nous sommes attachés au droit à blasphémer, @mouvement_npns condamne toute insulte envers quelque communauté ou croyance que ce soit. Mais pour autant, rien ne vient justifier le harcèlement et les menaces de mort », avant de préciser :  « Alors pour être précis, même si elle en a le droit, ce qu’a dit Mila était à notre sens contre-productive dans l’optique du vivre-ensemble- Elle le reconnaît elle-même. Mais cela ne justifie ni les menaces ni le harcèlement : nous la soutenons dans cette épreuve ».
  • Alain Finkielkraut sur le plateau de BFM TV : « Je ne dirai pas « je suis Mila » (…) là c’est pas de la vulgarité, c’est du dégueulis verbal » avant de rectifier plus tard « devant le déferlement d’ignominie sur Mila et la démission qui l’accompagne, je soutiens à fond cette jeune fille ».
  • Brice Hortefeux, ancien ministre et actuel député européen LR, au micro de BFM TV : « les propos de cette adolescente sont inutilement agressifs et injurieux », et, en même temps, « la justice doit réagir très rapidement et très fermement (pour condamner les appels au viol et au meurtre ».

En revanche, il est à noter que la chroniqueuse Rokhaya Diallo, pourtant connue pour son militantisme anti-raciste complaisant avec l’Islam politique, a défendu Mila contre les menaces de mort et de viol ainsi que son droit au blasphème. Si même Rokhaya Diallo a plus de courage que les responsables politiques ou associatifs cités ci-dessus…

Raymond Burke, un cardinal de plus en plus radical

Raymond Burke a été nommé cardinal par Benoît XVI en 2010 après une ascension rapide dans la hiérarchie catholique. Depuis l’élection du Pape François, il a vu ses fonctions s’amoindrir. Sa nomination en temps que représentant du Saint-Siège auprès de l’Ordre de Malte en 2014 a été perçue comme une mise à l’écart du Vatican. Ses prises de positions ouvertement conservatrices et de plus en plus traditionalistes lui ont ensuite valu une décharge de ses responsabilités, qui a suivi le non-renouvellement de son mandat à la Congrégation pour les évêques en 2013.

Depuis, le cardinal Burke multiplie les interviews. En 2016, il se positionne politiquement en se réjouissant dans le quotidien italien Il Gionarle de l’élection de Donald Trump, en qui il voit un défenseur des valeurs de l’Eglise. Des déclarations mi-religieuses, mi-politiques qu’il réitère n 2019 lorsqu’il affirme à Rome que « résister à l’immigration musulmane est un acte de patriotisme ». Lors de la légalisation de l’IVG en Irlande en 2018, il déplore dans le quotidien polonais Sieci le manque d’investissement de Rome dans le combat contre l’avortement. Selon Burke, il est « alarmant » que les responsables du Saint-Siège ne fassent pas d’avantage entendre leur voix contre toute légalisation de l’IVG ou du mariage pour les couples de même sexe.

Il est à l’initiative en 2016 d’une lettre ouverte aux Présidents des conférences épiscopales qui accuse directement l’Eglise de dérive lors du Synode sur la famille. Il y vilipende directement la « cause homosexuelle » qui se répandrait dans le clergé, et la rapproche des actes de pédophilie recensés parmi les prêtres catholiques ces dernières années. Dans un entretien au magazine The New Emangelization en 2015, il avait accusé cette fois-ci le féminisme d’ « agresser l’Eglise », de faire tomber les hommes dans « la pornographie, la promiscuité sexuelle, l’alcool, la drogue et toute une gamme de dépendances » et d’être responsable des actes pédophiles : «  Il y a eu une période où les hommes, féminisés et confus au sujet de leur propre identité sexuelle, sont entrés dans les ordres. Malheureusement certains de ces hommes souffrant de troubles, ont abusé sexuellement de mineurs ».

Le Cardinal Burke jouit désormais d’une notoriété certaine dans les milieux catholiques ultra-conservateurs et dans les milieux classés à l’extrême-droite de l’échiquier politique. Sa relation avec le Pape François semble désormais consumée. Dernier épisode en date, en septembre 2019, lors du synode sur l’Amazonie qui concernait l’écologie et la défense des peuples indigène, Raymond Burke a publié une tribune s’érigeant contre ce sommet qui contiendrait des « hérésies ». 

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Menaces sur l’IVG aux USA : où sont les féministes ?

L’accès à l’avortement est en théorie garanti aux Etats-Unis depuis l’arrêt Roe v. Wade de la Cour Suprême de 1973, qui a inscrit ce droit dans le quatorzième amendement qui protège le droit à la vie privée. La première grande brèche concernant l’accès à l’IVG pour toutes les américaines a été ouverte en 1992.  L’arrêt Planned Parentood v. Casey a alors reconnu le droit pour les différents états des Etats-Unis de restreindre les modalités d’avortement, et donc en pratique, de multiplier les amendements pour imposer des particularismes locaux aux femmes en fonction de l’électorat local.

L’accès à l’IVG n’a en réalité jamais cessé d’être au cœur des débats aux Etats-Unis. Les militants pro-vie les plus acharnés, souvent menés par des églises locales, continuent d’organiser régulièrement des « commandos anti-IVG », investissant des cliniques où l’avortement est pratiqué afin de harceler et de faire pression sur les femmes désirant avorter. La « marche pour la vie » rassemble plusieurs centaines de milliers de manifestants anti-IVG chaque année à Washington.

La bataille judiciaire est en parallèle incessante. Sous Trump, les anti-IVG se sentent pousser des ailes. Les attaques contre le droit à l’avortement aux Etats-Unis sont si intenses que la presse internationale en fait largement écho. En effet, le président américain se déclare « fermement en faveur de la vie, à trois exceptions près, viol, inceste et protection de la mère ». Il fait entrer deux nouveaux magistrats au sein de la Cour suprême, Neil Gorsuch et Brett Kavanaugh, pour rendre les juges pro-choix minoritaires (quatre juges sur neuf). La réaction ne se fait pas attendre. Le Texas interdit définitivement le remboursement des IVG par les assurances maladie. Le Mississippi, le Nebraska et le Missouri voient leurs cliniques fermer les unes après les autres, faute de financements, si bien que 95% de leurs comtés ne possèdent plus de cliniques pouvant pratiquer des avortements.

De nouveaux projets sont actuellement débattus. L’Arkansas tente de bloquer l’accès à l’IVG après 18 semaines de grossesse. La surenchère continue progressivement. L’Ohio et la Géorgie, après 6 semaines de grossesse, sous peine de prison, voire de peine de mort en Géorgie pour les femmes désirant avorter. Le Gouverneur d’Alabama va jusqu’à signer un texte interdisant l’avortement sans limite de semaines de grossesse, assorti d’une peine de prison de 99 ans pour les médecins qui le pratiqueraient.

Galvanisée par les discours électoralistes de Trump et une opportunité politique exceptionnelle, la droite religieuse, notamment évangélique, s’organise. Elle se rend de plus en plus visible dans les manifestations de rue, et se sent à raison de mieux en mieux écoutée et représentée au niveau politique et judiciaire.
En face, les militants pro-choix historiques tentent de résister au niveau judiciaire. Le Planning Familial (Planned Parenthood) et l’ACLU (American Civil Liberties Union) posent des recours en vertu du respect de l’arrêt Roe v. Rade. L’objectif pour ces deux associations promouvant les libertés individuelles est de suspendre ces arrêts le temps que leur constitutionnalité soit examinée. Au cours de débats acharnés,cela permet essentiellement de suspendre ces nouvelles lois avant de nouveaux examens de leur mise en application au niveau fédéral. Toutes les nouvelles lois anti-IVG ne pourront pas être appliquées de part leur extrémisme, mais de nombreuses petites restrictions passent à travers les mailles du filet.

Les militants pro-vie savent que si la Cour Suprême annule la plupart des lois (la décision sera prise fin 2019 ou début 2020 en Alabama), le flou volontairement entretenu est total pour les américaines vivant dans ces états quant aux possibilités actuelles et futures d’avorter. La résistance judiciaire monopolise les activités et épuise les membres du Planning Familial et l’ACLU, tant les nouvelles lois anti-IVG sont multiples (en nombre d’états concernés) et variées (en diversité de particularismes anti-IVG réclamés).

La bataille médiatique des militantes féministes pro-choix, elle, se fait globalement attendre. L’actrice Alyssa Milano s’est positionnée ouvertement pour le droit à l’IVG au nom des droits des femmes. Des sociétés de production d’Hollywood tentent de faire pression sur la Géorgie, en menaçant de ne plus tourner dans ses nombreux studios. Mais au niveau des associations féministes, on est loin du coup d’éclat. La médiatique Women’s March initiée en 2017 suite à la prise de pouvoir par Donald Trump, soutenue à ses débuts par plus de 200 associations féministes partenaires, défraye la chronique depuis plus d’un an… mais à cause de l’antisémitisme et de l’extrémisme religieux de plusieurs de ses membres fondateurs.

L’épisode semblait clos avec la décision de dissolution du bureau de la Women’s March fin 2018. En effet, Linda Sarsour, Tamika Mallory et Bob Bland, trois des quatre fondatrices, sont débarquées en 2019 suite à leurs liens évidents avec Nation of Islam, l’organisation complotiste et antisémite du gourou Louis Farrakhan. Outre la promotion du hijab comme outil de résistance, Linda Sarsour faisait également la promotion de la charia sur son compte Twitter. La décision de faire appel à un nouveau bureau a un temps rassuré les manifestantes vigilantes contre les revendications religieuses et l’antisémitisme. Mais deux événements vont de nouveaux discréditer l’organisation. Fin 2018, la Women’s March de Californie, une des plus suivies, est annulée par les organisateurs car elle serait « ‘overwhelmingly white », trop blanche, et ne « représenterait pas assez la diversité du coin ». Ou comment priver les femmes d’une manifestation féministe, où le thème du droit à l’IVG pourrait être défendu, en usant de pseudos statistiques ethniques, à la fois essentialisantes et injustes, réalisées a priori avec des méthodes et une idéologie douteuses. Autre épisode révélateur d’un mal profond : à l’été 2019, l’activiste Zahra Billoo, membre de l’association pro- Frères musulmans CAIR California, est recrutée. Plusieurs de ses anciennes déclarations refont surface, notamment lorsqu’elle déclare que l' »état d’apartheid en Israël tue des enfants comme un loisir » (“apartheid Israel kills children as a hobby”) et qu’elle ne voit pas de différence entre les jeunes américains qui partent rejoindre l’EI ou les forces de défense israëliennes… les deux sont meurtrières, des entités terroristes commettant des crimes de guerre, (no “difference between American youth leaving the country to join isis or idf . . . both are murderous, war crime committing terrorist entity.”). Sous la pression, elle se voit dans l’obligation de quitter l’organisation.

Alors que la Women’s March se présentait comme un mouvement féministe rassembleur auquel de nombreuses femmes et associations féministes se sont spontanément ralliées (en témoigne le succès de sa première édition : des centaines de milliers de manifestantes dans tout le pays et à l’étranger), le projet a pris l’eau sous les revendications religieuses et communautaires. Les scandales à répétition de la Women’s March, tel un feuilleton, choquent l’opinion publique américaine et internationale et font la une. Les droits LGBT ou reproductifs pourront attendre. Un véritable gâchis, qui a démobilisé de la scène militante des milliers de partisans.

Les rapports de force entre militants pro-vie et militants pro-choix sont de plus en plus intenses. L’ACLU et le Planning Familial tentent de faire barrage au maximum au niveau judiciaire, pour limiter le passage d’accommodements trop restrictifs. L’opinion publique est de plus en plus influencée par l’idéologie pro-vie, entre tentation religieuse évangélique, tentation nataliste, démobilisation des manifestantes pro-choix et dégoût des associations « féministes » polémiques. Tant que le féminisme sera incarné par des représentantes communautaires, désirant diviser puis compter les femmes en fonction de critères de couleur, et faisant preuve de complaisance avec l’antisémitisme et l’islamisme,.. Trump, l’alt-right et les anti-choix se frotteront les mains.

(crédit photo :  ANDREW CABALLERO-REYNOLDS AFP ILLUSTRATION)

Dialogue « inter-religieux » sur la bioéthique à Décines

Jeudi 3 mai 2018 aura lieu à Décines (Rhône) une conférence autour de la bioéthique, rassemblant divers représentants religieux sur le thème « les différentes traditions religieuses peuvent-elles éclairer les questions soulevées par les états généraux de la bioéthique ? ».

Cette conférence est-elle dans l’esprit de ce que souhaite Emmanuel Macron lorsqu’il appelle les religions à s' »engager dans le débat public », ici à propos de la PMA, de l’IVG (« début de vie ») et de la « fin de vie » ?

Parmi les intervenants annoncés, on retrouve :

– le cardinal Philippe Barbarin, farouche opposant à l’avortement et au mariage pour tous. Accusé de non-dénonciation d’agression sexuelle sur mineurs dans l’affaire Preynat, son procès se tiendra du 7 au 9 janvier 2019.

– Mohamed Minta, imam de la mosquée de Décines et professeur au lycée musulman al-Kindi de Décines, lycée mis en place et chapeauté par Nazir Hakim, vice-président de l’UOIF, en 2006. Mohamed Minta participe régulièrement à des conférences organisées par des organisations issues des Frères musulmans, comme la Rencontre Annuelle des Musulmans de France (RAMF) de l’UOIF ou la Rencontre Annuelle des Musulmans du Havre (RAMH),  organisée par Havre de Savoir. Ses ouvrages sont édités aux éditions Tawhid, dirigées par Yamin Makri, qui mène actuellement la fronde pour la libération de Tariq Ramadan.

– Azzedine Gaci, membre du bureau de l’UOIF chargé du dialogue inter-religieux. A cet égard, il organise le « forum islamo-chrétien » avec le Cardinal Barbarin. En 2013, il appelle à manifester contre le mariage pour tous avec La Manif Pour Tous.

– Daniel Bornstein, pédiatre à Villeurbanne.

– Nissim Sultan, rabbin à Grenoble et membre de la commission bioéthique du Consistoire de Paris.

– Isabelle Cathignol, médecin gériatre.

Parmi les partenaires de l’évènement, on retrouve Alliance Vita, association fondée en 1993 par Christine Boutin.

Le 26 janvier 2018, David Kimelfeld, président LREM de la métropole de Lyon, déclare lors d’une visite au centre interculturel de Décines  qu’il « se dégage quelque chose d’indéfinissable » chez Mohamed Minta. Il affirme que son prédécesseur, Gérard Collomb, « aurait aimé être ici ». Ce dernier, avait apporté son soutien en 2016 au Cardinal Barbarin, accusé de non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs, en estimant qu’il était victime d’un « faux procès ». Alors ministre de l’intérieur, il s’est également rendu à la messe des Echevins du Cardinal Barbarin en 2017, ce qui lui avait valu nombre critiques.

Se pose alors une question légitime : sachant que les représentants religieux les plus intégristes sont malheureusement les mieux organisés politiquement, cette conférence est-elle dans l’esprit de ce que souhaite Emmanuel Macron lorsqu’il appelle les religions à s' »engager dans le débat public » ?

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Civitas et la « Fête du Pays Réel »

Le 24 mars 2018 aura lieu à Rungis la deuxième édition de la « Fête du Pays Réel » de l’association Civitas, devenue parti politique depuis 2016. L’expression « pays réel » a été popularisée par le monarchiste Charles Maurras, en opposition au « «pays légal » honni, c’est à dire le gouvernement occupé par « quatre États confédérés »: « juifs, protestants, maçons et métèques ».

Sont annoncés à la Fête du Pays Réel :

  • l’abbé Xavier Beauvais, ancien curé de la paroisse intégriste Saint Nicolas du Chardonnet, qui officie désormais à la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X (FSSPX) de Marseille. En 2013, lors d’une manifestation de Civitas contre la « christianophobie », il avait lancé « Y’a bon Banania, Y’a pas bon Taubira » en référence à la loi Taubira sur le mariage pour tous.
  • Pierre Hillard, écrivain sur le « mondialisme » ainsi que sur le thème conspirationniste du « nouvel ordre mondial », il est édité chez Kontre Kulture, maison d’édition d’Alain Soral.
  • Marion Sigaut, ancienne militante d’extrême-gauche, désormais figure de la complosphère française et membre d’Egalité & Réconciliation. Ses ouvrages sur le monarchisme et contre les droits sexuels sont également édités chez Kontre Kulture.
  • Valérie Bugault, ancienne avocate qui se présente comme « analyste de géopolitique économique »
  • Olivier Wyssa, ancien conseiller régional FN et secrétaire départemental FN de l’Ain. Démissionné par son parti, il a par la suite soutenu Carl Lang.
  • Carl Lang, ancien directeur du Front National de la Jeunesse, conseiller régional FN et animateur de la campagne 2002 de Jean-Marie Le Pen. Opposant à Marine Le Pen, il créé en 2009 le Parti de la France avec l’aile dure des anciens du FN tels que Bernard Anthony, Jean-Claude Martinez ou Roger Holeindre.
  • Alain Escada, Président de Civitas depuis 2012.

Lors de sa première édition l’an dernier, Jean-Marie Le Pen avait fait le déplacement pour intervenir sur le thème « Immigration, submersion, destruction d’une civilisation ».

Depuis l’adoption de la loi Taubira pour l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, l’activité de Civitas semble être assez mince. Le 2 décembre 2017, Civitas tente un coup de force dans l’église Saint Irénée de Lyon où se déroulait une cérémonie œcuménique avec des protestants qualifiée de « réunion sacrilège », mais la police intervient rapidement. Le plus gros coup d’éclat récent de Civitas reste certainement sa manifestation le 18 novembre 2012 sous le slogan de « La France a besoin d’enfants, pas d’homosexuels », où des militantes FEMEN ainsi que l’essayiste Caroline Fourest avaient été rouées de coups.

Civitas avait tenté de revenir dans le débat public en se présentant dans quatorze circonscriptions aux élections législatives 2017, avec des résultats oscillants entre 0,2 et 1,1%. Étaient candidats pour le parti catholique intégriste Marie d’Herbais de Thun, ex-compagne de Frédéric Chatilon, ainsi que Alexandre Gabriac, ancien leader des Jeunesses nationalistes, d’inspiration pétainiste, exclu du FN en 2011 après la révélation publique d’une photo où il effectuait un salut nazi. Civitas, se présentant sous sa propre bannière, faisait partie d’un cartel nommé l’Union des Patriotes regroupant les Comités Jeanne, le PDF, le SIEL, la Ligue du Sud et l’Alliance Royale. Ce cartel a reçu le soutien officiel de Jean-Marie Le Pen. En novembre 2017, Alexandre Gabriac devient finalement secrétaire national aux fédérations, chargé de l’implantation de Civitas sur le territoire.

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Réunion de la droite catholique à l’Assemblée Nationale

Le 17 janvier 2018 se tiendra à l’Assemblée Nationale la « 3ème édition de la journée pour la vie ». Cette conférence est organisée par Marie-France Lohro, devenue députée Ligue du Sud suite à la démission de Jacques Bompard dont elle était la suppléante. En effet, ce dernier ne pouvait pas cumuler le mandat de maire d’Orange et de député du Vaucluse.

Sont annoncés :

– l’Abbé de Tanouarn, de l’Institut du Bon Pasteur, tous deux issus de la traditionaliste et radicale Fraternité Sacerdotale Saint Pie X (FSSPX).

– Philippe Maxence, rédacteur en chef de l’Homme Nouveau, revue catholique fidèle au Vatican.

– Laurent Dandrieu et Charlotte d’Ornellas, respectivement rédacteur en chef et journaliste de Valeurs Actuelles.

– Cécile Edel, présidente de l’association anti-avortement Choisir La Vie, qui co-organise chaque année la Marche Pour La Vie.

– Claire de Gatelier, présidente de Famille et Libertés, association catholique de droite dure ayant notamment soutenu Christian Vanneste après ses multiples propos homophobes.

– Stanislas de Larminat, promoteur de « l’écologie chrétienne », qui remet en cause l’activité humaine dans le réchauffement climatique.

– La Fondation Lejeune, très active contre l’avortement et l’euthanasie.

– Joël Hautebert, professeur à l’Université d’Angers et militant anti-avortement et anti-mariage pour tous.

– Charles de Meyer, président de SOS Chrétiens d’Orient (association réputée pro- Bachar al Assad), ancien assistant parlementaire de Jacques Bompard et membre du Printemps Français.

– Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Lejeune.

– Guillaume Bernard, professeur à l’Institut catholique de Vendée.

– Gabrielle Cluzel, rédacteur en chef de Boulevard Voltaire, site d’extrême-droite plusieurs fois épinglé pour avoir diffusé des hoax, et invité des personnalités ayant tenu des propos complotistes. Ainsi que Marc Eynaud, journaliste sur le même site internet.

– Jean-Frédéric Poisson, ancien député du Parti Chrétien Démocrate de Christine Boutin, militant pour l’inscription « des racines chrétiennes de la France dans la Constitution ». En 2015, il se rend à Damas pour rencontrer Bachar al-Assad.

– Marie-Pauline Deswartes, auteure et militante pour un retour aux « principes organiques du droit naturel transmis par la Grèce et Rome, puis approfondis et défendus par l’Église catholique ». Elle intervient également sur des sites complotistes comme medias-presse.info

– Guillaume de Thieulloy, rédacteur en chef de Riposte Catholique, site de « réinformation catholique ». De tendance traditionaliste, ce site d’information avait créé la polémique après les attentats du 13 novembre 2015. On pouvait y lire une tribune intitulée « Les Aigles (déplumés) de la mort aiment le diable ! » à propos des victimes du Bataclan : « ces pauvres enfants de la génération bobo, en transe extatique, « jeunes, festifs, ouverts, cosmopolites… », sont devenus « des morts-vivants ». « Leurs assassins, ces zombis-haschishin, sont leurs frères siamois. », «  »Vous invoquez le diable en rigolant ? Lui vous prend au sérieux », ainsi qu’une comparaison du nombre de victimes avec le nombre d’avortements en France.

– Guillaume de Premare, ancien président de la Manif pour Tous, et délégué général de l’Ichtus

– Philippe Mesnard, rédacteur en chef de l’Action Française 2000, journal du mouvement royaliste maurassien Action Française.

 

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Alain Finkielkraut et le « poisson noyé de l’Islam »

Dans une interview au Figaro Vox du 20/11/17, le philosophe Alain Finkielkraut affirme :

« L’un des objectifs de la campagne #balancetonporc était de noyer le poisson de l’islam : oubliée Cologne, oubliée la Chapelle-Pajol, oubliés les cafés interdits aux femmes à Sevran ou Rillieux-la-Pape, on traquait le sexisme là où il était une survivance honnie et l’on couvrait du voile pudique de la lutte contre les discriminations les lieux où il façonnait encore les mœurs. »

Alain Finkielkraut semble oublier volontairement tout le début du mouvement international de l’automne 2017 contre le harcèlement sexuel ainsi que la chronologie du hashtag #balancetonporc.

En effet, l’affaire Weinstein a débuté aux Etats-Unis, bien loin de Cologne, de la Chapelle-Pajol ou de Sevran, après la parution dans le New York Times et dans le New Yorker début octobre de deux enquêtes explosives avec des témoignages d’agressions sexuelles et de viols contre le producteur américain Harvey Weinstein. Le hashtag #metoo a ensuite été initié aux Etats-Unis, et le hashtag #balancetonporc en France par la journaliste Sandra Muller, inspirée par le titre du Parisien « A Cannes on l’appelait le porc ».

Il s’agissait d’ouvrir une brèche dans l’omerta sexiste du milieu du cinéma : jour après jour, des femmes osent elles aussi dénoncer ce que Harvey Weinstein leur a fait subir. Les plaintes s’accumulent. La brèche s’agrandit rapidement jusqu’à s’élargir à d’autres stars du cinéma telles que Kevin Spacey, Casey Aflleck, Dustin Hoffman, Jeremy Piven, James Toback… Il est étonnant de ne pas se réjouir de ce silence brisé et de ce « coup de balai » dans le milieu du cinéma.

L’affaire Weinstein a donc débuté dans un contexte américain, avant de s’internationaliser au niveau cinématographique mondial, puis au niveau national (avec pêle-mêle, des accusations contre des sportifs, des journalistes, des producteurs, des prédicateurs…). Le hashtag #balancetonporc ne s’est donc pas développé pour masquer des comportements sexistes de « l’Islam » en France. Et la gravité des faits dénoncés, leur multiplication, devrait suffire pour justifier l’existence du hashtag sans imaginer de « complot » pour « noyer le poisson de l’Islam ».

Et que penser de l’affaire Tariq Ramadan, qui a été certainement l’affaire d’agressions sexuelles la plus médiatisée en France ? Henda Ayari a utilisé le hashtag #balancetonporc pour raconter sur les réseaux sociaux le cauchemar qu’elle a vécu avec le prédicateur islamiste. Elle a eu le courage de porter plainte pour viol, agression sexuelle, violence, harcèlement et intimidations. Selon Alain Finkielkraut, Henda Ayari et les autres proies de Tariq Ramadan auraient voulu s’en prendre à l’un des prédicateurs islamistes les plus célèbres en France, pour « noyer le poisson de l’Islam » ? Le raisonnement ne tient pas.

La conclusion d’Alain Finkielkraut est dangereuse, tant dans les stéréotypes qu’elle induit, que dans la lutte contre le sexisme.

Faire de l’Islam la pierre angulaire du sexisme en France est faux. 20% des femmes ont souffert de harcèlement sexuel au travail, et plus de 75% des viols sont commis par l’entourage direct de la victime (famille ou proches). Parler de « survivance honnie » dans les milieux du cinéma, du travail, de l’entourage, c’est aller trop vite en besogne tant les cas d’agressions sont fréquents. Réjouissons-nous que les victimes osent enfin parler et que la honte commence à changer un petit peu de camp, mais ne crions pas une victoire qui est encore loin d’en être une.

La meilleure façon de lutter efficacement contre le sexisme est de voir, de dire ce que l’on voit, de dénoncer et d’analyser chacune de ses démonstrations. Lorsque le sujet d’actualité porte sur les 1000 à 1500 femmes agressées à Cologne, il est contre-productif de vouloir faire taire les victimes lorsqu’elles décrivent le portrait jeune, alcoolisé, organisé et nord-africain de leur centaine d’agresseurs, au motif que le sexisme serait plus présent dans le milieu familial et professionnel. Il est chez Alain Finkielkraut tout aussi contre-productif et stérile de vouloir passer sous silence les agressions dénoncées par #balancetonporc au motif que des comportements sexistes liés à l’Islam « façonn[er]aient les moeurs ».

Les faits ne sont ni « islamophobes », ni « islamophiles ». Toutes les femmes victimes méritent d’être écoutées et défendues, tous les milieux sexistes doivent être dénoncés sans être mis en concurrence dans des propos quasi-complotistes.

Catherine Hervé

L’imposture de Jacques Testart

Jacques Testart, la caution des anti-choix qui parle de « dérives » de l’avortement et du rôle précurseur de l’évangélisation chrétienne. Article de 1998 dans Prochoix avec, déjà, un petit mot affectueux de Christine Boutin. 

 

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La ‘mode pudique’ des nouvelles bigotes

Nous sommes en 2017 et la « mode pudique » is the new « mode islamique », qui devenait trop marquée religieusement. Pour certains, la « mode pudique » est désormais également un nouveau féminisme, complètement dépolitisé, mais surtout sharia-compatible.

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En 2016, l’expression « mode pudique » est apparue progressivement dans les médias après que plusieurs grandes marques telles que H&M, Zara, Dolce & Gabbana ou encore Uniqlo aient sorti une ligne de vêtements à destination des femmes voilées. Le marché est en plein essor : les prévisions envisagent un marché à 327 milliards de dollars en 2020. La ministre des Droits des Femmes, Laurence Rossignol s’en était émue, jugeant ces marques « irresponsables ». Rokhaya Diallo s’était alors indignée des propos de la ministre dans Jeune Afrique :

« Et pour moi, la première victoire des femmes est de pouvoir disposer de leur corps librement. Et je trouve ça scandaleux qu’une ministre du Droit des femmes considère qu’elle doive protéger une partie des femmes seulement. Elle manque de respect à ces femmes qui font le choix de porter le foulard : elle ne considère pas que leur droit à s’habiller comme elles le souhaitent soit un droit ».

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Ce qui était précédemment considéré comme « mode islamique » devient « mode pudique ». Citons également les Hijab Day, organisés notamment à Sciences Po, promus de la même manière. La « mode pudique » est alors plutôt défendue au nom du libre choix de se vêtir, puisque le voile et les vêtements amples et longs seraient des « vêtements comme les autres ». La dépolitisation du religieux est alors en route. Dans la présentation du Hijab Day à Sciences Po on peut lire :

« Si toi aussi tu trouves que ce serait sympa d’essayer la décence, le respect de l’autre, l’échange et la compréhension mutuelle, tout ça, tout ça… dans notre société tristounette»

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Récemment, lorsque la polémique autour de Lallab a éclaté, il est apparu que cette association promouvait elle aussi la « mode pudique », ou « modest fashion » en anglais, tout en se revendiquant ouvertement féministe. Il n’est plus seulement question de revendiquer le droit de se vêtir de façon « pudique » au nom des libertés individuelles, mais également de considérer que la « mode pudique », c’est féministe.

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Il est nécessaire de lever les ambiguïtés volontairement introduites dans le débat par les militant(e)s de la « mode pudique ». Les féministes universalistes ne remettent pas en question le droit des femmes de se vêtir selon leurs goûts, ne militent pas pour que les vêtements « pudiques » soient interdits. Pourtant, elles sont taxées d’ « islamophobes » et de mauvaises féministes car en critiquant la « mode pudique », elles s’attaqueraient aux femmes musulmanes. Si tout féminisme est critiquable, y compris le féminisme universaliste et matérialiste, ce dont ne se privent pas ces militantes, la « mode pudique » l’est aussi. Les universalistes exercent un de leur droit, à la liberté d’expression, pour rappeler plusieurs points essentiels.

Tout d’abord, la pudeur, comme le fait de couvrir les femmes, n’a rien de subversif. Le Larousse désigne la pudeur comme une « Disposition à éprouver de la gêne devant ce qui peut blesser la décence, devant l’évocation de choses très personnelles et, en particulier, l’évocation de choses sexuelles ». Faut-il préciser que gêne, décence, et timidité sexuelle font partie des stéréotypes associés et demandés au genre féminin ? Être féministe, n’est-ce pas revendiquer le droit de ne pas vivre sous les complexes et les tabous, d’assumer son corps, d’occuper l’espace public, de façon égale aux hommes ?

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Les prescriptions religieuses n’ont jamais été sources de féminisme. L’escroquerie du « féminisme chrétien » n’a pas eu de mal à être démasquée lorsqu’il s’agissait de femmes chrétiennes revendiquant en leur nom le droit de rester au foyer, et d’être anti-avortement. Personne n’a songé à affirmer qu’il s’agissait de l’avant-garde des féministes car c’était des femmes qui s’exprimaient. Il existe bien évidemment des féministes musulmanes, plus ou moins croyantes, qui ambitionnent d’élargir les droits des femmes dans un contexte précis, et sans intrusion du religieux. Le « féminisme islamique », qui englobe la « mode pudique », fait plutôt l’effet inverse : il emmène plus de religion dans les droits des femmes de par ses références littéraires et politiques ou de par la promotion du voile, qui est par essence sexiste car ne s’appliquant pas aux hommes.

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Enfin, la « mode pudique » n’est pas une « mode comme les autres ». Cette façon de décontextualiser et dépolitiser la mode islamique permet de la relativiser pour la confondre avec les autres vêtements. Comme nous l’avons vu, elle s’inscrit dans un cadre religieux et dans un contexte général où la pression religieuse au niveau français comme international devient de plus en plus présente. Vouloir faire passer la promotion du voile ou des tenues « pudiques » comme similaire aux autres tenues est habile… si l’on masque les références religieuses et politiques, il n’y a plus de « problème », et les féministes universalistes sont tout simplement racistes. Seul ennui pour les partisans de la « mode pudique » : user de cet argument pour dépolitiser et « dé-religioser » cette mode rentre en contradiction avec l’argument précédent comme quoi le « féminisme islamique », ou issu des prescriptions islamiques, existerait…

La boussole féministe des partisans de la « mode pudique » est comme déréglée. L’aiguille n’indique plus l’égalité femme-homme, mais vacille dans tous les sens, puisque tout n’est qu’affaire de choix pour que ce soit considéré comme « féministe ». Ainsi, Lila et Alma Lévy, les deux lycéennes qui avaient fait les gros titres en 2003 en refusant d’enlever leur voile pendant les cours, avaient par la suite ensuite également évoqué sur le plateau de l’émission Campus le « libre choix »… de se faire lapider pour adultère.

Il est ainsi plus que nécessaire de combattre l’analogisme ambiant qui voudrait que toute critique de la « mode pudique » = « islamophobie ». Tous les féminismes sont susceptibles de faire l’objet de critiques, du féminisme le plus ambitieux au féminisme le plus religieux. Y compris donc celui qui voudrait imposer un panneau STOP aux féministes universalistes, de toutes nationalités, qui tentent depuis tant d’années de repousser petit à petit les limites des inégalités sexuelles, le puritanisme et les interprétations sexistes des textes religieux.

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La subversion et l’émancipation féministes s’inscrivent-elle contre la nudité féminine, qui est pourtant non acquise, considérée comme vulgaire, sexuelle, menaçante et provocante, à la différence de celle des hommes ? Cette nudité est pourtant dénoncée comme « dominante » aussi bien par les promoteurs de la « mode pudique » que par des militants de l’islam politique. Ou la subversion et l’émancipation féministes s’inscrivent-elle contre la maîtrise du corps des femmes par quelque institution que ce soit, contre le puritanisme et les tabous sexuels, dans un objectif d’ égalité femme/homme ?

Il semblerait que répéter en boucle que la «mode pudique » est un « choix » féministe in-jugeable ne résiste pas à l’épreuve du temps, de la critique et de la contextualisation. Certaines associations féministes, comme certaines qui se sont précipitées pour signer dans Libération une pétition de soutien à Lallab, ou pour apporter leur soutien sur les réseaux sociaux, trouveraient une idée salutaire en clarifiant leur position et ligne directrice vis-à-vis de ce concept qui mute petit à petit du domaine religieux au féminisme.

   Catherine Hervé

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